Instagram: non, les influenceurs ne vont pas disparaître avec le compteur de likes

C’est l’annonce qui risque de changer beaucoup de choses sur Instagram, mais pas comme vous le croyez: la suppression du compteur de likes. Une manière, au final, de changer la perception des influenceurs, sans les attaquer, contrairement à ce que le public semble penser.

L’annonce de la disparition imminente du compteur de likes sur Instagram a créé une effervescence sur les réseaux sociaux. Beaucoup se félicitent de cette décision du réseau social connu pour rassembler des milliers d’influenceurs, qui seraient « en PLS » face à cette annonce. Influenceur, c’est une profession des temps modernes destinée à booster les likes d’une marque, pousser à l’achat ou simplement créer une fidélisation des acheteurs via son influence sur les réseaux sociaux.

En gros, un influenceur, c’est un support de communication un peu plus chaleureux qu’un panneau géant, et qui fédère bien plus qu’un panneau déroulant à l’arrêt de tram.

Mais il est dérisoire de penser que les influenceurs vont réellement souffrir de cette suppression des likes. S’il existe effectivement une « bulle de l’influence » qui pourrait exploser à chaque instant, ce n’est pas cet événement qui va créer la chute du marché de l’influence.

D’autres outils sont disponibles

Il faut savoir tout d’abord une chose: les marques passent la plupart du temps par des agences ou des consultants pour sélectionner les futurs intervenants dans leur campagne. Ces derniers ne vont pas uniquement se baser sur un nombre de followers s’ils veulent choisir une personne de qualité. Enfin, s’ils font bien leur travail.

Ainsi, pour vérifier si telle personne n’est pas allée acheter des followers pour gonfler son nombre d’abonnés ou de likes et paraître plus attractif, le sélectionneur d’influenceurs compétent ira sur SocialBlade.

SocialBlade, c’est une application et un site internet qui permet, en rentrant le nom de l’un ou l’autre utilisateur qui a une certaine portée, de voir l’évolution dans le temps des likes, followers et la fiabilité d’un compte à la fois sur Instagram, Facebook, Twitter, Youtube et tout le toutim. Il permet, par exemple, de remarquer quand un influenceur a une audience réelle ou achetée, ce qui peut tout changer quand à la portée réelle d’un partenariat.

Un exemple de compteur d’abonnés au fil du temps, avec le compte de @Deggand. Ici, rien d’anormal, l’audience est réelle – Socialblade

Toutes les marques ne vont cependant pas prendre la peine de faire cette vérification. SocialBlade demeure un outil performant pour évaluer le nombre de likes et surtout les interactions et l’engagement d’une communauté face à un influenceur.

L’influence ne se résume plus à un nombre de likes

On parle donc d’engagement. Aujourd’hui, les marques ne vont plus penser qu’en nombre de likes vis à vis du choix de tel ou tel profil Instagram. Beaucoup vont d’ailleurs privilégier la « micro-influence » d’une communauté réduite mais soudée que le partenariat avec une giga-star des Internets qui pourrait être plus onéreuse et, quelque part, moins performante.

https://twitter.com/MarcGhislainCMR/status/1152142271653064704

En d’autres termes, mieux vaut un partenariat avec plusieurs petits influenceurs pour avoir une portée réelle et un meilleur rapport de confiance plutôt que chercher à payer des fortunes pour que Gaëlle Garcia-Diaz ou Gaëlle VP fassent la promotion de votre marque.

L’autre variable qui ne changera pas, et qui ne se résume pas à un nombre de likes, c’est l’importance actuelle des stories, qui sont devenues bien plus créatives et attractives au fil du temps. Unboxings, essayages, visites… Certains partenariats ne durent que 24 heures et défilent au rythme de courtes vidéos segmentées, parfois même sans post sur la page de l’influenceur.

L’influence est trans-réseaux

Les influenceurs ne sont pas que sur Instagram, et heureusement pour eux. On l’a vu avec la récente campagne du SNU en France: une campagne d’influence bien pensée, c’est une campagne qui va se retrouver à la fois dans un post Facebook, une vidéo YouTube, des stories Instagram et un hashtag efficace sur Twitter. Même si YouTube envisage lui aussi de supprimer le compteur de likes, rien n’empêchera les influenceurs d’influencer, quelle que soit la plateforme.

La bulle de l’influence, seul vrai danger

Si vous avec une telle haine des influenceurs que vous rêvez de les voir disparaître, il faudra attendre. Depuis quelques années, avec le surplus d’instagrammeurs qui se lancent dans l’aventure, l’économie des influenceurs est sujette à un certain nombre de risques, avec en première ligne la présence un peu trop importante de « fakes ». En d’autres termes, certains vendent une influence qui n’existe pas.

Dans un article paru l’année dernière sur Vice Belgique, Lucie Van Damme, blogueuse et consultante en marketing digital, parlait de ces personnes qui vendent une image qui, en soi, n’existe pas: « Aujourd’hui, tout le monde le fait (acheter des abonnés, ndlr). Il y en a qui ont déjà une énorme base de followers, mais pour continuer à grossir, ils en achètent. D’autres le font de manière flagrante. Quand tu vois qu’un type a genre 45 000 followers et à peine 300 likes et deux commentaires sous ses posts, c’est assez parlant. »

Le jour où les marques se rendront compte de la supercherie – si ce n’est pas déjà le cas, cette vente frauduleuse et hasardeuse risque de faire tomber toute une salve de « fake influenceurs ». Le trop-plein risque aussi, au final, de créer un désengagement qu’on remarque déjà chez les plus gros instagrammeurs.

La démarche d’Instagram, bénéfique pour les influenceurs?

Au final, une question se pose: cette démarche ne serait-elle pas plus bénéfique qu’on n’y pense pour les influenceurs? Le réseau social s’inscrit, comme Facebook l’année dernière, dans une démarche qui vise à privilégier le contenu au-delà de la popularité. Pour Instagram et le marché des influenceurs, il est aussi question d’éviter que la bulle dont on parlait plus tôt n’explose, en privilégiant les profils qui sont dans une réelle démarche de contenu.

https://www.instagram.com/p/Bz8P6FgoNTe/

Pour Eléonore Degand, qui comptabilise plus de 10.000 abonnés et a à son actif une quinzaine de partenariats (Bershka, K-Way, & Other Stories…) , c’est aussi une bonne nouvelle: « J’ai une démarche contradictoire, parce que j’essaie de ne pas me prendre au sérieux sur Instagram. En même temps, je regarde le nombre de likes, et ça va influencer sur mon attitude. Je vais me sentir valorisée quand je vois qu’une publication fonctionne, tout comme je vais me poser beaucoup de questions quand une autre a du mal à avoir du succès. Quelque part, c’est tant mieux si les likes sont supprimés: je vais pouvoir me concentrer sur ce qui me plait plutôt que ce qui va plaire au public. »

Cependant, ce changement ne va pas signer, pour elle, la fin de la compétitivité entre influenceurs: « C’est comme imposer un uniforme dans une école: même si tout le monde se ressemble, il y aura toujours une différence entre ceux qui sont plus populaires, cool, et ceux qui le sont moins. »

Alors, non, les influenceurs ne vont pas s’évaporer avec la disparition du compteur de likes. Par contre, on peut espérer un contenu plus qualitatif dans les prochains mois. On verra bien comment les choses évolueront pour les quelques pays déjà concernés par ce changement.

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