Le petit pays a décidé de dépénaliser complètement l’usage et la possession de cannabis pour les adultes, de même que sa culture, jusqu’à quatre plants par foyer, selon une annonce du gouvernement grand-ducal. Une manière de couper l’herbe sous les pieds des trafiquants.
Ce n’est plus une opinion à contrecourant depuis longtemps : les politiques de prohibition ne fonctionnent pas, quelque soit le produit concerné, les utilisateurs trouveront toujours un moyen de s’en procurer. Pour les plus grands profits des trafiquants et autres contrebandiers, parfois prêts à utiliser la violence pour défendre et faire fructifier leur commerce.
De manière générale, maintenir en vigueur une interdiction et un système répressif envers les consommateurs n’en vaut pas la chandelle, d’autant plus pour des produits aisément accessibles et peu dangereux tels que le cannabis. Le Grand-Duché de Luxembourg vient donc de prendre un chemin rigoureusement contraire: le gouvernement a annoncé ce vendredi qu’il légaliserait totalement le chanvre indien sur son territoire.
C’est non seulement l’usage du cannabis qui sera dépénalisé, mais aussi la récolte à des fins personnelles : les Luxembourgeois âgés d’au moins 18 ans pourront faire pousser jusqu’à quatre plants par ménage, tant qu’ils restent destinés à une consommation personnelle. Quant aux graines qui permettraient de faire pousser ces plantes, elles seraient aussi entièrement légalisées, sans critère de variété ou de taux de THC. Elles pourraient se vendre dans le commerce, mais aussi s’échanger ou s’acheter sur le Web.
Consommation domestique
L’objectif assumé du gouvernement luxembourgeois est de contrecarrer la contrebande de cannabis, qui brasse des sommes faramineuses et qui est parfois liée à de plus dangereux trafics. Le pays veut, si pas encourager, supprimer tout obstacle à une consommation purement domestique et personnelle du cannabis, ce qui pourrait ébranler les réseaux de contrebande.
Avec une telle libéralisation, le Grand-Duché va devenir le pays le plus permissif d’Europe pour tout ce qui a trait au cannabis. Aux Pays-Bas, souvent pris comme référence sur la question, le gouvernement a conçu une politique relative aux drogues qui tolère le fait de fumer du cannabis, selon des conditions très strictes, ce qui n’équivaut pas à une totale légalisation. La consommation est certes tolérée, mais il faut une licence spéciale pour en vendre en magasin. Le pays a aussi validé un plan expérimental de culture de cannabis contrôlée par l’État, et qui entrera en vigueur cette année.
Une enclave verte en Europe
A l’inverse, d’autres pays européens comme la France s’entêtent dans une prohibition dure, alors que le commerce illégal de cannabis représente une part très importante de l’économie souterraine, employant 150.000 à 200.000 personnes et représentant un chiffre d’affaires de 1,2 milliard d’euros en 2017. Quant à la Belgique, elle oscille selon les gouvernements entre relative tolérance et rappel de la loi : le cannabis reste interdit dans le royaume, mais dans la pratique la possession « pour son usage personnel » ne sera vraisemblablement pas poursuivie, sauf si cette détention s’accompagne de circonstances aggravantes ou de troubles à l’ordre public. La limite officieuse est de 3 grammes sur soi ou d’un plant à domicile, mais il ne faut pas oublier que tout dépendra de l’interprétation des forces de l’ordre. Autrement dit, notre pays aussi laisse la production et le commerce de weed à l’économie souterraine.
Difficile de prédire comment le Grand-Duché va gérer sa politique de légalisation avec des voisins moins permissifs, mais dont les populations pourraient vouloir se fournir au Luxembourg. C’est d’ailleurs un potentiel avantage touristique pour le pays, même si le précédent canadien, où ce boom du secteur a tourné au flop, devrait servir d’avertissement.
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