Que se passe-t-il en Arabie saoudite? Le régime s’est lancé dans une purge sans précédent

Plusieurs princes, ministres et anciens ministres ont été arrêtés hier soir en Arabie saoudite. Une purge sans précédent dans l’histoire moderne du pays, qui a surtout pour but de permettre au futur roi, Mohammed ben Salmane, de renforcer son pouvoir avant d’accéder au trône. Son père, le roi Salmane, étant âgé de 81 ans.

« L’étendue et l’ampleur de ces arrestations semblent être sans précédent dans l’histoire moderne de l’Arabie saoudite », alerte à l’AFP Kristian Ulrichsen, spécialiste du Golfe à l’institut Baker de l’Université Rice aux États-Unis.

En effet, quatre ministres, des dizaines d’ex-ministres et onze princes ont été arrêtés hier soir, rapportent plusieurs médias arabes dont la chaîne saoudienne Al-Arabiya. Parmi les personnes arrêtées, il y a de grands noms, dont le prince et milliardaire Al-Walid ben Talal. Mais cette information n’a pas été confirmée officiellement. De même, les chefs de la Garde nationale saoudienne (une sorte d’armée parallèle composée majoritairement de forces terrestres) et de la Marine ont été virés.

Anti-corruption

Cette énorme purge aurait pour but de permettre au prince héritier, Mohammed ben Salmane, de renforcer son pouvoir avant son accession au trône. Timing parfait, les arrestations tombent quelques heures après la création, par décret royal, d’une commission anti-corruption. Celle-ci est dirigée par le prince héritier et composée du président de la Commission de Monitoring et d’Investigation, du président de l’Autorité nationale Anti-corruption, du chef du Bureau d’Audit général, du Procureur général et du chef de la Sécurité de l’État.

Tu l’as compris, l’objectif de cette commission est de préserver l’argent public en enquêtant et arrêtant toute personne impliquée dans des pratiques de corruption. Sans aucune pitié. À ce titre, elle a le droit de l’interdire de quitter le pays pour voyager, de geler ses comptes et portefeuilles, ou encore de traquer les fonds et avoirs. « Puisque nous avons remarqué l’exploitation de certaines âmes faibles qui ont placé leurs propres intérêts au-dessus de l’intérêt public, pour, illicitement, accumuler de l’argent », précise le roi Salmane (son père âgé de 81 ans) dans son décret publié dans la presse.

Selon des experts, la plupart des personnes arrêtées critiquaient aussi la politique étrangère musclée du jeune prince de 32 ans, ainsi que certaines de ses réformes telles que la privatisation d’entreprises publiques ou encore la diminution des subventions de l’État.

Promesse d’un régime « modéré »

Et pourtant, le prince Mohammed ben Salmane avait promis un régime « modéré », en rupture avec l’ultra conservatisme et le rigorisme religieux qui dirigent depuis longtemps l’Arabie saoudite. Il a d’ailleurs lancé plusieurs grandes réformes sociétales à saluer: l’ouverture de cinémas, le droit des femmes de voter, de se rendre dans des stades publics et bientôt de conduire et assister à des événements sportifs.

Un bouleversement culturel et économique très positif, mais qui s’accompagne hélas d’un renforcement musclé de l’emprise de l’État. Le futur roi contrôlant désormais les principaux leviers du pouvoir, de la défense à l’économie, et cherchant visiblement à faire taire les voix dissidentes.

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