Une campagne anti-vaccins fait passer pour mort un bébé bien vivant

Ils osent tout: une association anti-vaccins italienne utilise la photo d’un bébé bien vivant (et vacciné), le faisant passer pour mort, histoire d’illustrer sa propagande « antivax ». La méthode a de quoi surprendre, pour ne pas dire dégoûter…

On pensait avoir à peu près tout vu en termes de désinformation, de fake, et de mauvaise foi du côté des anti-vaccins purs et durs. C’était sans compter cette campagne de l’organisation italienne anti-vaccination obligatoire Corvelva. Sans gêne, l’association a acheté la photo d’un bébé dans une banque d’images, pour flouter son visage et écrire dessous en grosses lettres: « Je suis décédé après un vaccin hexavalent, les rapports ont occulté ma mort », suivi du hashtag #Icantforget. L’association cherche à dénoncer le laboratoire GSK, qui aurait supprimé de ses rapports destinés à l’Agence Européenne du Médicament un nombre important de morts subites du nourrisson après la vaccination.

L’image tourne dans le monde entier, les pages Facebook antivax se faisant un plaisir de relayer l’affiche, forcément.

L’enfant est vivant

Sauf que le bébé de la photo n’est pas du tout décédé mais se porte très bien, est à jour dans ses vaccins, et a aujourd’hui à peu près 5 ans. C’est le fils du photographe Brayden Howie, qui a vendu sa photo à la banque d’images Shutterstock, et le petit bout fait la couverture d’un livre avec cette même photo. « J’ai contacté l’organisation pour leur demander de retirer cette image – sans succès, pour l’heure (…) Cette utilisation de ma photo est illégale », explique le photographe dans Le Monde.

L’effet visage flouté

Sur la page Facebook Info Vaccins France (pas vraiment pour les vaccins, vous l’aurez compris), l’argument principal pour défendre l’usage de la photo c’est qu’en gros on n’allait pas utiliser l’image d’un bébé mort quand même… Sauf que l’affiche joue bien l’ambiguïté grâce au floutage. Comme le dit un internaute, le flou donne l’impression que le bébé est réellement mort, car en temps normal on ne floute pas le visage des bébés, surtout pas sur les photos achetées.

L’administrateur de la page se défend dans un post récent:

Pourtant, quand on consulte les conditions de licence de la banque d’images Shutterstock, il est clairement précisé qu’on ne peut pas « représenter toute personne dans des Contenus visuels (un « Modèle ») d’une manière qu’une personne raisonnable trouverait offensante (…) comme souffrant de, ou sous traitement pour, une affection mentale ou physique », et encore « utiliser des contenus visuels dans un contexte pornographique, diffamatoire ou trompeur, ou d’une manière qui pourrait être envisagée comme diffamatoire, obscène ou illégale. »

Une technique de com’ jouant sur l’affect bien huilée

Il s’agit donc purement et simplement d’une publicité mensongère. Les défenseurs de cette campagne pourront toujours parler d’image d’illustration, et dire que la fin justifie les moyens – seul le message compte -, la méthode ne fait que mettre en évidence les grosses ficelles de l’imagerie antivax: jouer sur l’affect et la peur en utilisant des photos de bébés qui pleurent après une piqûre (3/4 des photos de couverture des groupes anti-vaccins) ou qui sont soi-disant morts. Carrément. La plupart des gens qui verront cette image s’afficher dans leur newsfeed croiront que ce bébé est vraiment mort à cause d’un vaccin. « Photo non contractuelle » ou « image d’illustration » ne sont pas inscrits en bas de l’affiche. Et, quand bien même, les concepteurs de telles images ont bien compris que peu importe la vérité, du moment que l’image et le message circulent sur les réseaux sociaux, le mal est fait.

Rappelons qu’à ce jour aucun lien scientifique tangible n’a été établi entre mort subite du nourrisson (MSN) et vaccin. Mais comme les causes de MSN sont, par définition, inconnues (on préfère d’ailleurs aujourd’hui parler de mort subite inexpliquée du nourrisson), et que les vaccins sont principalement administrés dans la période où le risque de MSN est le plus grand (lien de temporalité), la vaccination est une cible facile.

Ce qui est sûr et certain, c’est que cette affiche ment.

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