Theresa May a sauvé sa peau, mais la perspective d’un « no-deal » sur le Brexit est de plus en plus forte

Theresa May a évité de justesse une destitution de la tête du Parti conservateur et du gouvernement. Elle a remporté hier soir le vote de défiance organisé contre elle par son propre parti, mais en est ressortie encore un peu plus affaiblie. Le pire a été évité, mais le plus difficile est encore devant elle. Et les Européens ne comptent pas venir à sa rescousse.

Theresa May a eu chaud ses fesses ce mercredi soir. La Première ministre britannique a été confrontée à un vote de défiance organisé par son propre parti, le Parti conservateur, qui espérait la voir tomber et de son poste de leader du parti et de son poste de cheffe de l’État. Pour rester en fonction, elle avait besoin de la majorité simple des votes des députés en sa faveur, soit 159 voix.

Ce qu’elle a réussi à obtenir puisqu’elle a recueilli 200 voix en sa faveur, mais tout de même 117 voix contre elle. Cette victoire, elle la doit sans doute à la grosse concession qu’elle avait faite un peu plus tôt dans la journée: accepter de ne pas se représenter en tant que cheffe de file du Parti conservateur aux prochaines élections législatives de 2022. Juste avant le vote, elle est allée un peu plus loin en déclarant devant devant le Comité 1922, qui est responsable de l’organisation interne du Parti conservateur, qu’elle projetait de quitter ses fonctions avant les élections et qu’elle n’avait pas l’intention non plus de faire campagne.

Le pire a été évité, mais…

Et heureusement, car si elle avait échoué, elle aurait automatiquement été évincée et les conservateurs auraient dû lui trouver un(e) remplaçant(e). Mais ce scénario aurait créé un peu plus le chaos autour du Brexit puisque son successeur n’aurait pas été connu avant la mi-janvier, et encore, si aucun nouveau gouvernement n’aurait pu se mettre en place endéans les 14 jours, le Parlement aurait dû être dissous et des élections anticipées organisées. Autrement dit, on serait reparti à zéro, ou presque.

Le pire a donc été évité, mais les heures à venir ne s’annoncent pas de tout repos pour Theresa May. Elle doit désormais faire approuver l’accord sur le Brexit au parlement britannique. Accord qui est le fruit de 18 mois de dur labeur et d’intenses discussions entre Bruxelles et Londres et qui a été approuvé par les dirigeants des 27 États membres de l’UE le 25 novembre dernier.

Cet accord conclu avec les Européens devait déjà être soumis au vote ce mardi, mais May a annoncé, ce lundi en dernière minute, qu’elle le reportait à une date ultérieure (mais toujours inconnue). Pour éviter un cuisant échec. Car si les Européens trouvent cet accord équilibré, ce n’est pas le cas des Britanniques, préoccupés essentiellement par le point sur le « filet de sécurité » (ou « backstop »). Celui-ci doit créer un « territoire douanier unique » englobant l’UE et le Royaume-Uni, de façon à éviter le retour d’une frontière physique entre l’Irlande (qui restera dans l’UE) et l’Irlande du Nord (qui appartient au Royaume-Uni) après le Brexit. Et faute de solution crédible permettant de régler ce problème à l’issue de la période de transition post-Brexit d’au moins 21 mois, le Royaume-Uni restera dans une union douanière avec l’UE pour une durée indéterminée. Ce que contestent les pro-Brexit ainsi que le Parti unioniste démocrate (DUP) d’Irlande du Nord, qui veulent l’assurance que cette situation ne sera que temporaire.

Deux scénarios possibles

Mais pour les Européens, pas question de renégocier cet accord, seules des clarifications sont possibles. D’ailleurs, en théorie, ce filet de sécurité est une option de dernier recours, qu’ils sont prêts à clarifier dans le texte. Pas question non plus d’envisager pour le moment l’option de prolonger la période de négociations pour deux ans. Sauf s’il y a des raisons qui le justifient, qu’il y ait clairement une garantie d’aboutir à un accord ou à une annulation du Brexit par exemple.

Pour la suite des événements, un sommet européen est prévu à Bruxelles ces jeudi et vendredi, où Theresa May est attendue de pied ferme. Pour le moment, les travaux avancent dans le sens du texte conclu, car tout le monde veut que l’accord de retrait du Royaume-Uni entre en vigueur à la date butoir du 29 mars 2019, afin d’éviter un Brexit désordonné aux conséquences douloureuses. Mais les Européens ne perdent pas de vue la possibilité d’une absence de ratification à la Chambre des Communes du Royaume-Uni, ce qui mènerait à un « no-deal », donc aucun accord fin mars 2019. Les différents États membres, dont Bruxelles, ont d’ailleurs également accéléré leurs préparatifs en ce sens.

Tu l’auras donc compris, seuls deux scénarios sont envisageables pour les Européens : l’accord de retrait conclu en novembre ou pas d’accord du tout, mais personne ne veut de cette deuxième option. Tous les regards sont à présent tournés vers Londres, où c’est là que la clé du problème doit être trouvée.

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