« Il y a le divertissement audiovisuel mondial, et il y a le cinéma »: Scorsese explique ses propos sur les films Marvel

Il a créé l’outrage ou un soutien fort ces dernières semaines en déclarant que les films de superhéros ressemblaient davantage à des parcs d’attractions qu’à du cinéma. Dans un long billet, Martin Scorsese a décidé de mettre un point final à l’histoire en expliquant les mécanismes de sa pensée.

Ben Stiller a repartagé le billet de Martin Scorsese en signe de soutien.

« Beaucoup de films de franchise sont réalisés par des gens d’un talent artistique considérable. (…) Le fait que les films eux-mêmes ne m’intéressent pas est une question de goût personnel et de tempérament. » Dans un long billet d’opinion pour le New York Times, Martin Scorsese a souhaité s’exprimer sur ses propos vis-à-vis des films Marvel, qu’il a comparés à des parcs d’attractions et qu’il ne considère pas comme du cinéma.

Ce papier, c’est le témoignage d’un autre cinéma. La raison principale pour Martin Scorsese de son rejet de la myriade de films de superhéros, c’est son appartenance à une autre génération, une autre vision du cinéma comme il l’explique lui même.

De la franchise hitchcockienne à la franchise Marvel

Après son introduction sur le cinéma qu’il a appris à aimer en grandissant, on peut diviser sa réponse aux nombreuses critiques en deux parties. La première est une comparaison entre ce que pouvait être une franchise autrefois et ce qu’elle représente aujourd’hui: « Certains films d’Hitchcock ressemblaient aussi à des parcs d’attractions. Je pense à « Strangers on a Train », dont le point culminant se déroule sur un manège dans un véritable parc d’attractions, et à « Psycho », que j’ai vu lors d’un spectacle de minuit le jour de son ouverture, une expérience inoubliable. »

Mais ce qui change pour lui, c’est le fait que le phénomène d’attraction, créé par des moments de tension et des retournements forts est devenu l’argument numéro un des films contemporains: « Beaucoup des éléments qui définissent le cinéma tel que je le connais sont présents dans les images de Marvel. Ce qui n’est pas là, c’est la révélation, le mystère ou un véritable danger émotionnel. Rien n’est en danger. Les images sont faites pour satisfaire un ensemble spécifique de demandes, et elles sont conçues comme des variations sur un nombre fini de thèmes. »

Pour lui, il n’y a qu’un nombre de possibilités finies dans les films grand publics, et c’est là où le bât blesse. En citant après Wes Anderson ou Claire Denis, réalisateurs contemporains, il met en exergue ce qui lui plait avec le cinéma d’auteur, indépendant des gigantesques structures du cinéma: la nouveauté.

La peur de la perte du cinéma d’auteur et indépendant

Les goûts personnels de Martin Scorsese ne sont effectivement pas là pour dénigrer les oeuvres des réalisateurs. De par sa déclaration courte qui a déclenché le scandale, il explique dans cette tribune ce qu’il voulait en réalité dévoiler: le monopole des films de divertissement et la place qu’ils prennent dans les cinémas.

« Dans de nombreux endroits aux USA et dans le monde, les films franchisés sont maintenant votre premier choix si vous voulez voir quelque chose sur grand écran. C’est une période périlleuse pour la projection de films, et il y a moins de cinémas indépendants que jamais. » Pour lui, la perte de l’indépendant, c’est la perte de la vision individuelle d’un artiste retransmise sur grand écran. Une affaire qui n’est pas seulement de la demande, mais aussi la responsabilité des studios.

La perte du risque

Toute cette plainte de Scorsese peut se résumer à une perte: celle du risque. « Beaucoup d’entre eux sont bien faits par des équipes d’individus talentueux. Pourtant, il leur manque quelque chose d’essentiel au cinéma : la vision fédératrice d’un artiste individuel. Parce que, bien sûr, l’artiste individuel est le facteur le plus risqué de tous. »

C’est en cela que le réalisateur différencie « cinéma » et films franchisés. Pour lui, il s’agit d’avantage de « divertissement audiovisuel mondial », qui domine financièrement le marché des longs-métrages. Au final, c’est de la tristesse que Martin Scorsese ressent: « Pour tous ceux qui rêvent de faire des films ou qui en sont à leurs débuts, la situation actuelle est brutale et inhospitalière pour l’art. Et le simple fait d’écrire ces mots me remplit d’une terrible tristesse. »

Plus d’un pourra contredire les propos de Martin Scorsese, surtout sur la partie où il attaque la liberté créatrice des réalisateurs. Mais le poids financier des films de « divertissement », comme il les appelle, est effectivement énorme aujourd’hui. Il suffit de regarder le calendrier du MCU pour s’en rendre compte.

Qu’il ait raison ou tort, cette prise de position est sans doute un témoin de l’état actuel du cinéma, une vision de la part d’un homme qui en a marqué l’histoire et continue d’évoluer aujourd’hui.

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