Sommet européen express: le contexte international vole la vedette à l’élargissement vers les Balkans

Les chefs d’État s’étaient donné rendez-vous à Sofia en Bulgarie pour y discuter élargissement avec les pays des Balkans. Mais les dernières décisions des États-Unis ont monopolisé les débats. L’UE veut se serrer les coudes. Et imposer sa voix dans un contexte international très difficile.

Soleil radieux, organisation parfaite, ambiance tendue: la Bulgarie accueillait un sommet européen très attendu dans le cadre de la présidence semestrielle de l’UE. Un sommet européen express puisque les chefs d’État ne se sont vus que quelques heures, en vase clos. Ils devaient y discuter élargissement avec les pays des Balkans (Serbie, Bosnie-Herzégovine, Albanie, Monténégro, Macédoine et Kosovo), mais le contexte international difficile a monopolisé l’attention.

Une réplique, pas la guerre

De ce point de vue, ce sommet est tombé à pic pour permettre à l’UE de se montrer ferme et unie. D’abord sur le volet commercial: les décisions des États-Unis sur le nucléaire iranien et sur l’acier et l’aluminium touchent directement des entreprises européennes. Les Européens veulent répliquer. Pas en entamant une guerre économique avec les États-Unis – dont personne ne tirerait bénéfice – mais en protégeant leurs entreprises.

Notamment par la « loi de blocage« . Ce mécanisme date de 1996 mais n’a jamais été employé: il permet aux entreprises et tribunaux européens de ne pas se soumettre à des réglementations de pays tiers qui les impacteraient économiquement. Il est aussi question de mesures de rééquilibrage: des taxes calibrées sur des produits emblématiques américains. Mais pas de grandes contre-sanctions.

Sur le nucléaire iranien à proprement parler, l’UE entend maintenir l’accord de 2015. Emmanuel Macron veut toutefois poursuivre les discussions pour le compléter. Le but est de toute façon évident: stabiliser la région et permettre à l’Europe de jouer un rôle majeur, quelque part entre les États-Unis, la Russie et la Chine.

En attendant, États-Unis ont monopolisé les débats. Faut dire que Donald Trump y a mis tout son cœur: après le retrait de l’accord iranien et les replis protectionnistes, le déplacement de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem aura achevé la relative bonne ambiance que pouvaient afficher Trump et Macron il y a encore quelques semaines.

Charles Michel (MR) n’est pas en reste et est passablement énervé par rapport l’attitude du Président américain. Les masques tombent. Donald Trump fait ce qu’il dit, souvent pour le pire, rarement pour le meilleur. Le Premier ministre pense que le président des États-Unis veut mettre fin au multilatéralisme. C’est du chacun pour soi. Le milliardaire est dans la logique business: je gagne, tu perds. Pas de sentiment. Dans ce contexte, notre Premier ministre plaide pour une Europe plus forte.

Et les Balkans?

Ah, on allait presque oublier les pays des Balkans. Rien n’a été décidé. Il faut dire que l’élargissement de l’Europe est tout sauf un sujet sexy. Les citoyens européens sont plutôt dans la défiance des institutions, ils se trouvent déjà bien assez nombreux. Le sens de l’histoire n’en prend pas le chemin, mais…

Mais la porte n’est pas tout à fait fermée non plus. Le processus d’adhésion de l’Albanie et la Macédoine sera discuté en juin lors d’un prochain sommet. Il faudra d’abord que la Grèce et la Macédoine – ou l’Ancienne République yougoslave de Macédoine de son vrai nom – règlent leurs différends. Le nom « Macédoine » pose toujours problème aux Grecs qui le revendiquent. Le terme « Haute-Macédoine » pourrait être accepté par la Grèce, rapporte La Libre, mais rien n’a été décidé définitivement.

Pour les autres pays, la situation est encore plus compliquée. La Serbie et le Kosovo – qui n’est pas reconnu par cinq membres de l’UE (dont l’Espagne) – doivent aussi régler leurs problèmes. Mission presque impossible. Et de manière générale, les pays des Balkans ne sont pas parvenus à réduire l’écart avec l’UE, notamment au niveau démocratique et économique, même si l’UE est loin d’être irréprochable (coucou la Hongrie et la Pologne).

Balkans et UE se reverront en 2020 pour un sommet en Croatie. En espérant cette fois conclure. Pour le reste, l’UE doit joindre le geste à la parole. Et montrer que l’unité affichée au sommet devienne une opportunité.

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