La Belgique a perdu sa bataille qui l’opposait à l’Europe pour la lutte contre les cadeaux fiscaux qu’elle accorde aux multinationales. La Cour européenne de Justice a rejeté la demande introduite par notre gouvernement contre cette décision du mois de janvier, qui obligeait notre Etat à récupérer quelque 700 millions d’euros auprès des grandes entreprises. Mais cette décision, bien qu’ennuyeuse à première vue pour le gouvernement, est un argument de plus en faveur d’un des chevaux de bataille de la N-VA: la réduction de l’impôt sur les sociétés.
La marche arrière semble impossible: la Belgique devra bien aller chercher 700 millions dans « les poches » des multinationales. En avril dernier, la Belgique avait intenté une action auprès de la Cour de justice européenne pour obtenir l’annulation de cette décision de la Commission européenne. Mais cet appel a été rejeté, rapporte l’Echo samedi dernier.
Ces cadeaux fiscaux qu’accorde la Belgique aux grandes entreprises sont monnaie courante en Europe. La concurrence interne entres Etats pousse les petits pays à attirer des entreprises internationales en utilisant un régime fiscal plus favorable. Et ça, la Commission européenne n’en veut plus. Starbucks, Fiat, ou même AB Inbev, pourtant belge, ne payent quasiment aucun impôt sur les énormes bénéfices qu’ils font, que ça soit aux Pays-Bas, au Luxembourg, en Irlande ou en Belgique.
La Commissaire européenne à la concurrence Margrete Verstager a mis la Belgique dans les cordes. Elle en veut particulièrement à ces 50 réglementations belges, appelées aussi « excess profit rulings », qui favorisent fiscalement les multinationales sur notre territoire. De cette manière, elles n’ont absolument rien à payer sur leurs bénéfices, du moins ceux qui proviennent de leur activité internationale.
Sur la liste, on retrouve entre autre AB Inbev mais aussi le géant pétrolier britannique BP, l’entreprise allemande chimique BASF, un fabricant américain de pièces de rechange pour voitures (Wabco), ou encore le fabriquant de tabac, Brtitish American Tobacco. Proximus figure aussi dans le lot.
Pourquoi les petites entreprises payent plus que les autres?
Tous ces cadeaux soulèvent des questions sur l’équité: pourquoi donc les multinationales payent-elles moins d’impôts que les PME. En gros, pourquoi ce sont les petites entreprises qui trinquent? La réponse est aussi cynique que simple: les PME ne peuvent tout simplement pas faire leurs valises et aller voir ailleurs. Une grande entreprise, elle, si le régime fiscal dans un pays ne lui convient pas, et bien elle vous laisse en plan… et elles ne s’en privent pas d’ailleurs.
En attendant, la Belgique n’a pas montré beaucoup de volonté pour récupérer ces fameux 700 millions. Elle veut d’abord s’assurer qu’elle a utilisé tous les moyens légaux pour éviter de le faire. Ainsi le ministre des Finances, Johan Van Overtveldt (N-VA) s’est rendu lui même à la Cour européenne de Justice. Mais l’appel, on l’a vu, a été rejeté. Il est donc maintenant en pleine consultation auprès de 50 grandes entreprises pour voir comment il peut procéder pour récupérer cet argent.
Revoir le taux d’impôt sur les sociétés
Mais pour Van Overveldt, cette situation avec les multinationales est aussi un argument de plus pour son principal cheval de bataille: la réduction de l’impôt sur les sociétés (Isoc). Ce taux est pour l’instant à 34%, et est accompagné d’une série d’échappatoires comme les « excess profit rulings » ou les montagnes de réductions en tout genre. Le but avoué du ministre et de son parti, la N-VA, est d’absolument baisser ce taux (à 20-22%) et de supprimer le plus possible l’ensemble de ces exemptions fiscales. Cela devrait selon elle, donner un coup de boost à l’économie de notre pays et favoriser le décalage qu’il peut exister entre les PME et les grandes entreprises.
Mais la tâche n’est pas si facile: Van Overveldt veut faire une proposition de budget « neutre », soit un taux inférieur sur l’impôt des sociétés sans affecter les revenus pour le gouvernement, un défi de taille. Surtout quand on sait que le CD&V, son partenaire dans la coalition, ne voit pas ces cadeaux fiscaux aux entreprises d’un bon œil.
Du côté du MR non plus, au départ, on était pas favorable à ce changement de régime, qui donne une mauvaise image auprès du peuple. Mais suite à la réunion du gouvernement ce weekend à Val Duchesse, que voit on apparaître dans « les 25 mesures phares » pour le futur de notre pays? On vous le donne en mille: « la réforme de l’Isoc ».
Bref, cela démontre en tout cas l’influence de la N-VA, il est vrai premier parti du pays, dans le programme gouvernemental. Quoiqu’il en soit, leur intention est de discuter du dossier pour la mi-août.
