Les yeux du monde entier sont rivés sur Paul Magnette: il ne peut plus faire machine arrière

Paul Magnette et la Wallonie n’en démordent pas: « il serait raisonnable de reporter sans date ». Bref, au diable le CETA. Il a beau se défendre de tout opportunisme politique: si jamais il avait cédé maintenant, en tous cas sans obtenir de sérieux changements, son image en aurait pris un sacré coup. 

Ce matin, au micro de Bertrand Henne sur la Première, Paul Magnette, le ministre-Président de la Région wallonne n’a pas reculé d’un pouce, fidèle à ses positions de toujours sur le CETA: « Il serait raisonnable de reporter sans date, je ne veux pas de confrontation » a-t-il insisté. Il n’a pas manqué de rappeler, non plus, que « grâce à notre mobilisation, il y a eu des avancées considérables. »

Parmi les avancées, il y a par exemple des éclaircissements concernant l’interdiction de l’importation du bœuf aux hormones ou encore des avancées en matière de développement durable. Ainsi « si vous légiférez en matière environnementale et sociale, vous pourrez attaquer ceux qui violent ces lois », a souligné fièrement Paul Magnette.

Le bât blesse toujours

Mais celles-ci ne suffisent pas, le bât blesse toujours à trois endroits bien précis: l’organisation de l’arbitrage entre état et entreprise qui se sentirait lésée, parce que les tribunaux d’arbitrage seraient en-dessous des normes de garantie. Paul Magnette pointe aussi la clause de sauvegarde agricole, qui protège les 35 millions de Canadiens vis-à-vis des plus de 500 millions d’Européens mais qui devrait pouvoir fonctionner dans les deux sens. Enfin, la notion, trop floue juridiquement, de « l’activité économique substantielle » ne lui est pas acceptable non plus.

« Le PTB est le cadet de mes soucis »

Paul Magnette ne se laisse pas décourager, ni par les « menaces à peine voilées » qu’il recevrait du monde des affaires, ni par les accusations de certains d’opportunisme politique. Au monde des affaires et son « on va désinvestir », il rétorque qu’il y a des principes sur lesquels on ne doit pas transiger. « Il faut pouvoir dire, monsieur, je n’accepte pas votre menace. » Même pas peur, Paul Magnette: « Je suis convaincu qu’une société raisonnable ne va pas tout d’un coup quitter le pays par mesure de rétorsion. »

Et si on lui parle d’opportunisme électoral, il rétorque que « le PTB est le cadet de mes soucis ».

Oui, mais…

Avec tout ça, Paul Magnette a quand même gagné du galon parmi la gauche européenne. Les anti CETA de toute l’Europe et même au-delà, du Canada, l’encouragent à résister encore et toujours à l’envahisseur et à résister fièrement.

C’est une première que la Belgique, petit état et europhile de surcroît, bloque un accord européen… Auquel normalement, on dit oui ou on dit non. Les menus particuliers ne sont pas dans les habitudes de la maison. Ici, Cecilia Malström, la commissaire européenne au Commerce, a quand même sorti lundi une note d’interprétation de 1.600 pages, Justin Trudeau, le Premier canadien, a sans doute dû annuler son vol de la semaine prochaine. Ça ne fait pas plaisir à la Flandre qui est pour le CETA, à Didier Reynders (MR) qui doit assumer ça pour la Belgique. Même le Financial Times parle de la Wallonie pour le coup.

Le Québec ne peut pas manquer de remarquer cela, pas plus que ceux qui s’en font au sujet des négociations concernant le Brexit.

Lorsque le CETA (en préparation depuis un petit temps) était négocié par le gouvernement Di Rupo, il n’y a pas eu trop de protestations de notre côté. Mais les temps ont changé. Aussi, maintenant que le PS voit le PTB gagner du terrain et a tout intérêt à bien renforcer son image de marque, Paul Magnette ne peut pas lâcher le morceau, en tout cas pas sans obtenir de sérieuse concession. Les anti-CETA du monde entier le regardent, ses futurs électeurs aussi.

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