Le PS refuse de débattre avec la N-VA, officiellement pour éviter la question communautaire

Vu l’opposition radicale entre les deux partis, les débats entre le PS et la N-VA s’annonçaient déjà comme les joutes les plus attendues de la période électorale. Mais celles-ci n’auront pas lieu, révèlent De Tijd et L’Écho ce mardi. Le PS refuse, sous prétexte que la discussion sera monopolisée par des questions communautaires.

Plusieurs débats étaient prévus entre des représentants du PS et de la N-VA dans les prochaines semaines. RTL et la VTM souhaitaient opposer les deux présidents de parti Elio Di Rupo et Bart De Wever. LN24, la chaîne d’info en devenir, prévoyait de faire débattre Theo Francken avec un ponte du PS. Et

L’Echo et De Tijd avaient prévu d’organiser une rencontre entre Bart De Wever et Paul Magnette. Mais ces duels n’auront pas lieu.

« Le contexte a changé », explique Paul Magnette à L’Écho. « En 2014, la N-VA était le challenger qui venait avec son projet confédéral, il y avait une nécessité de lui opposer une voix francophone. Aujourd’hui, nous n’avons pas envie de débattre avec la N-VA pour centrer la campagne sur le communautaire et l’institutionnel alors que les enjeux sont tout autres. Nous voulons parler du modèle social et climatique, de notre programme. »

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Un PS pleutre?

Interrogé par L’Echo, le président de la N-VA Bart De Wever a pointé le « manque de courage » des socialistes francophones. « Il faut avoir peu de courage pour d’abord exiger avec bravoure l’organisation de tels débats – c’est notamment le cas de Paul Magnette – pour finalement faire marche arrière à la simple vue du podium. C’est un signe de faiblesse. »

Le bourgmestre de Charleroi se défend en invoquant la communication musclée de l’ancien secrétaire d’État à l’Asile et aux Migrations Theo Francken. « On ne sait plus très bien quelle est la différence entre le Vlaams Belang et la N-VA. Je n’ai jamais eu peur d’affronter Bart De Wever en débat, je l’ai déjà fait [à L’Écho] et à la télévision », explique Paul Magnette. Mais « on n’a pas envie que la discussion se limite à l’enjeu communautaire. »

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Les meilleurs ennemis

Ce refus est d’autant plus surprenant sachant que lors de la dernière campagne électorale, les deux partis s’étaient rencontrés à plusieurs reprises, donnant lieu à de solides joutes où chacun avait pu défendre ses thèmes favoris. En avançant sur la question du communautaire, De Wever avait, en 2014, réussi à pointer le PS comme son véritable ennemi, une stratégie qui s’était révélée gagnante au sein de l’électorat flamand.

À l’inverse, le PS avait pu jouer sur la peur d’une fracture nationale que l’arrivée au pouvoir de la N-VA aurait pu entraîner. Ce discours reprenant le besoin de faire front en bloc contre les nationalistes flamands avait rapporté de nombreuses voix aux socialistes wallons. Ces débats étaient en quelque sorte un système gagnant-gagnant pour les deux meilleurs ennemis puisqu’ils leur permettaient de susciter l’adhésion au sein de leur propre communauté linguistique.

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Luttes internes au PS

Mais il se dit que la véritable raison de ce refus ne serait pas à placer du côté de la couardise ni du côté communautaire d’ailleurs. Il semblerait que le problème vienne simplement d’une lutte d’ego au sein du Parti socialiste francophone.

Ces débats sont l’occasion de révéler qui sont les « champions des francophones ». Or, au sein du PS, Magnette et Di Rupo ont chacun la capacité d’être ce champion, mais sont-ils prêts à concéder cette place à leur coreligionnaire? L’ancien Premier ministre Elio Di Rupo, également président du PS depuis 20 ans, aimerait bien reprendre une dernière fois les clés du Seize. Dans le passé, il n’était pas totalement opposé à l’idée d’une alliance avec la N-VA, même s’il ne l’a jamais vraiment ébruité.

Magnette, aujourd’hui bourgmestre de Charleroi et tête de la liste du PS à l’Europe, paraît peu enclin à laisser le socialiste de 67 ans s’octroyer tous les lauriers. D’autant plus qu’il ne partage pas la même vision stratégique de la politique que son aîné. Elio Di Rupo semble prêt à faire des concessions à la N-VA sur la question du confédéralisme, puisqu’il a déjà évoqué un « cabinet miroir » qui aurait la même composition que les gouvernements des deux côtés de la frontière linguistique. Paul Magnette est radicalement opposé à cette idée et exclut toute forme de coopération avec les nationalistes.

rtl

Ecolo sera le nouvel ennemi

Puisque le PS fuit, la N-VA pourrait se tourner vers Ecolo qui, avec Groen, forme la famille politique la plus plébiscitée par les sondages. Dans ce contexte, c’est sans doute Jean-Marc Nollet, le co-président d’Ecolo, qui irait débattre avec Bart De Wever pour De Tijd et L’Echo. VTM et RTL n’ont pas encore indiqué s’ils étaient prêts à remplacer le duel avec Di Rupo par une rencontre avec un « Vert ».

Les Verts sont de plus en plus les ennemis de la N-VA: sur les questions d’écologie et de climat, les nationalistes flamands sont les critiques les plus pugnaces de Groen et d’Ecolo. Dans le débat sur la suppression des voitures de société, qui est devenu l’un des chevaux de bataille des Verts, la N-VA se présente comme un farouche opposant.

Ces questions prégnantes font qu’une confrontation avec Ecolo ne tournera sans doute pas autour du thème communautaire, comme cela aurait pu être le cas avec le PS. Ces duels avec les Verts se présentent donc comme une alternative pour la N-VA à première vue moins directement profitable.

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