« L’Afsca savait depuis mai pour le Fipronil dans les œufs »: c’est ce qu’affirme un député Groen

La crise du Fipronil est partie pour durer. Ou plutôt: la crise politique autour de l’agence alimentaire n’est pas près d’être terminée. Bien que le boss de l’Afsca, Hermann Diricks, ait rassuré hier son ministre de tutelle en se défendant dans l’émission de la VRT Terzake, une nouvelle charge pèse contre lui aujourd’hui. L’eurodéputé Groen, Bart Staes, est formel: « Depuis mai, l’Asca était au courant de l’infection sur base d’une enquête privée ».

Hier encore, l’Afsca se défendait bec et ongles: « Nous n’avons jamais tenté de dissimuler quoi que ce soit ». Ces mots ont été prononcés sur le plateau de l’émission Terzake sur la VRT par le patron de l’agence fédérale Herman Diricks. Il était aussi confiant pour la sécurité des œufs sur le marché belge, malgré la polémique autour du seuil minimal utilisé par l’Afsca et qui a fait l’objet d’un « malentendu ».

Herman Diricks s’est entretenu avec les trois ministres compétents pour les convaincre que l’Afsca avait agi dans les règles. Mais tant Denis Ducarme (MR), fraîchement nommé ministre de l’Agriculture, que Maggie De Block (Open VLD), ministre de la Santé, ou Kris Peeters (Cd&V), se serait bien passé d’une telle polémique durant les vacances, avec une communication pas toujours au point.

Mais aujourd’hui, nouveau pavé dans la mare: l’expérimenté député européen Bart Staes (Groen) lance une nouvelle attaque contre l’agence fédérale. Il a découvert des documents accablants pour l’Afsca et établis par des services européens, une fois que l’Autorité européenne de sécurité des aliments mise au courant de la situation, c’était le 20 juillet.

Gros décalage

Et les documents concernés sont particulièrement sévères avec l’Afsca, déclare Staes: « Ils datent du 20 juillet, soit le moment où le service belge a indiqué aux autres États membres qu’il y avait ‘un problème sérieux’ avec le Friponil. Mais il se base sur les informations d’une enquête initiée le 15 mai. Une enquête menée par une société privée et qui a rendu des résultats très sérieux: des concentrations de 1,2 mg du produit incriminé ont été retrouvées. Et ces concentrations concernaient une entreprise belge en particulier. C’est cette même entreprise qui a informé le service et probablement les autorités compétentes », a déclaré Staes sur Radio 1.

« La grosse erreur ici, c’est que les autorités belges auraient dû être informées bien plus tôt de ces résultats. L’enquête date du 15 mai. A la limite, les résultats ont eux été confirmés début juin. Cela ne justifie en rien un report au 20 juillet. C’est extrêmement lent et il ne s’agit en aucun cas d’un système d’urgence rapide. Alors qu’on a besoin d’opérer rapidement, comme nous l’ont montré chaque crise alimentaire », a ajouté Staes.

VRT

Crise politique

Reste que le politique continue de mettre la pression sur l’Afsca. Le ministre de l’Agriculture Denis Ducarme veut un rapport complet de la crise sur son bureau. Parce que la tempête n’est pas encore partie, en tout cas au niveau de la communication. Herman Diricks a promis de son côté de livrer un dossier volumineux sur l’ensemble des mesures prises depuis le déclenchement de la crise.

Les concentrations en Fipronil trouvées dans les œufs sont nettement plus basses en Belgique par rapport aux Pays-Bas ou à l’Allemagne. Mais à cause de cette mauvaise communication justement, notre pays prend cher et est même pointé comme le responsable de la crise. L’Afsca a pourtant pu étudier le rapport de l’instruction qui était en cours sans toutefois pouvoir le communiquer. Mais ce n’est jamais un argument en politique: cela doit aller beaucoup plus vite et de manière plus transparente.

La mauvaise communication entre l’Afsca et le ministre de l’époque, Willy Borsus, suscite pas mal d’interrogations. Du coup Défi demande même au tout nouveau ministre-président de la Région wallonne de venir s’expliquer en commission ce mercredi: « Si l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (Afsca) a effectivement mis sept semaines pour informer son ministre de tutelle de la situation – et nous ne manquerons pas de vérifier la chose – on peut s’interroger sur la loyauté de l’agence. Et dans le chef du ministre, on peut clairement parler d’un problème d’autorité », affirme le vice-président de Défi, Jonathan Martin.

Des concentration finalement dangereuses?

En attendant, il y encore une incertitude: les contaminations observées chez nous sont-elles dangereuses? 21 poulets ont été contaminés en Belgique. L’Afsca dit que les concentrations sont bien en deçà des limites européennes, ce qui est vrai. Mais le réputé toxicologue de la KUL Jan Tygat pointe le fait que certains critères de la Commission européenne sont plus stricts: 0,005 mg/kg. C’est peu. Parce qu’un enfant de 25 kilos ne pourrait manger que deux œufs contaminés toutes les 24 heures. Quatre œufs sur cinq pourraient provoquer des problèmes de santé dans ce cas pour l’enfant. « On flirte avec la limite », a ajouté Tygat.

Demain, le parlement va discuter du problème, et l’opposition, à n’en pas douter, aura de sérieuses questions à poser. En tout cas, cette nouvelle information de Staes devrait un peu plus tendre les débats.

EPA
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