La « ligue du LOL » prend une tournure politique: le secrétaire d’État au Numérique parle de « lâches » et de « harceleurs »

Les révélations autour de la « ligue du LOL » ont atteint le champ de la politique française. La secrétaire d’Etat  à l’égalité femmes-hommes Marlene Schiappa et le secrétaire d’État au numérique Mounir Mahjoubi ont dénoncé dimanche l’existence de ce groupe aux influences nocives.

Une affaire a fait grand bruit ce week-end en France: les révélations autour de la « ligue du LOL ». Un article de Libération raconte comment, vers la fin des années 2000, ce groupe plus ou moins secret de journalistes et de communicants parisiens exerçait une influence depuis Twitter qui dépassait le simple cadre des réseaux sociaux.

Une trentaine de personnes réunies sur Facebook se moquaient d’autres et fixaient une sorte de norme comportementale. Ceux qui s’en écartaient étaient raillés et parfois harcelés avec une certaine violence. Des victimes de cette époque racontent avoir souffert moralement, socialement et professionnellement à cause de cette pression. Les « caïds » étaient principalement des mâles blancs dans la vingtaine. Parmi les victimes, on trouvait des « racisés », des membres de la communauté LGBT+ et des grosses.

Tournure politique

Ces révélations ont choqué un nombre très important de gens. Les membres de cette ligue sont aujourd’hui pour la plupart devenus des personnalités influentes et respectables du microcosme parisien du journalisme et de la communication. Certains ont même participé à des tables de discussions sur le harcèlement. D’autres ont écrit des articles sur le mouvement #MeToo et sur le féminisme contemporain. D’autres encore ont adopté des postures moralistes qui, pour de nombreux utilisateurs de Twitter, sont révélatrices d’une grande hypocrisie.

L’affaire a pris une telle proportion qu’elle s’est propagée au monde politique. Invité sur le plateau de BFM TV, le secrétaire d’État français au numérique Mounir Mahjoubi a parlé de lâches et de loosers. « Cette #LigueDuLOL , c’est l’histoire de loosers, des mecs qui se gargarisaient de pouvoir se moquer d’autres personnes. Sauf que ces moqueries ont eu un impact dans le réel. Les victimes de cyberharcelement doivent pouvoir s’exprimer, et eux, j’espère qu’ils ont honte. »

Mounir Mahjoubi

Mahjoubi veut même voir cette histoire passer au tribunal. « J’ai invité les victimes à rendre public les faits, même prescrits, et pour ceux non prescrits à déposer plainte. Ils doivent rendre compte de leurs actions. »

Schiappa veut que justice soit rendue

Citant un tweet de Natacha Quester-Séméon, fondatrice de l’association « Jamais Sans Elles », la secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes a également réagi à la polémique sur Twitter ce dimanche 10 février. « Tout mon soutien et ma solidarité aux blogueuses et journalistes qui ont eu à subir le harcèlement sexiste de la ‘Ligue du LOL’ « , écrit-elle.

Elle rappelle qu’en France, ces faits sont punissables par la justice. « La loi votée cet été pénalise désormais le « cyberharcelement en meute » ou « raid numérique ». Le harcèlement est caractérisé par la répétition des messages tweets ou posts, et plus seulement corrélée à un seul auteur. »

Hugo Clément et Martin Weill, accusés en 2017

Les témoignages concernant la « ligue du LOL » ont fait remonter d’autres faits de harcèlement. La journaliste Nassira El Moaddem, directrice du Bondy Blog de 2016 à 2018, raconte avoir vécu des faits similaires, même s’ils n’ont aucun rapport avec la « Ligue du LOL ». Dans son témoignage, elle indique que les futurs journalistes Hugo Clément, Martin Weill et un troisième l’auraient harcelé alors qu’ils étaient tous encore à l’école supérieure de journalisme (ESJ) de Lille.

El Moaddem raconte que les journalistes auraient usurpé une identité et se seraient fait passer pour un cadre important chez Radio France dans le but de lui faire miroiter un poste. « Puis, j’ai été accusée par ces trois mêmes auteurs de chercher à prendre la place d’autres élèves, de vouloir les écraser et j’en passe », écrit-elle. « Dans ce petit milieu compétitif qu’est une école de journalisme, je n’étais pas la seule à avoir été leur cible. »

À l’époque, le site Check News avait tenté de discerner le vrai du faux. Il s’agissait apparemment d’un canular, connu de la promotion et de la direction. Les journalistes concernés ont été sermonnés à l’époque, ce qui n’a visiblement pas satisfait Nassira El Moaddem.

Sollicité, Hugo Clément nie toute accusation de harcèlement. Il ne veut toutefois pas faire davantage de commentaires.

Et le rôle des écoles?

Parmi les personnalités choquées par ces histoires, l’on retrouve Marc Capelle, l’ancien directeur de l’école supérieure de journalisme de Lille (ESJ Lille). Dans un tweet, il souligne avec un certain étonnement l’irruption dans la sphère publique d’une histoire vieille de presque dix ans. La réponse de la journaliste est cinglante.

Aujourd’hui, l’association « Jamais Sans Elles » se mobilise pour défendre ces victimes et pour tenter de mettre un terme au harcèlement

Une problématique que le gouvernement français semble avoir pris à bras le corps, en témoigne ce tweet de Macron (datant d’avant la polémique):

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