La douloureuse vérité sur les tunnels : après des années de négligence du gouvernement bruxellois, on parle maintenant de péages

Devoir fermer les tunnels à Bruxelles n’est rien de moins qu’un désastre économique. Les spécialistes sont toutefois unanimes : on n’aurait jamais dû en arriver là. En cause : le mauvais entretien de la Région bruxelloise. Et c’est ce même gouvernement, avec comme figure de proue Pascal Smet (sp.a), qui risque à présent de devoir en payer les pots cassés. 

Bruxelles est sans nul doute la seule ville au monde où, après 23 heures, les tunnels ferment. Quasi à chaque fois, les automobilistes sont alors obligés de faire des tours et des détours pour trouver d’autres passages. Le plus difficile à avaler dans tout ça ? Ces fermetures quotidiennes ne sont pas dues à l’entretien approfondi des tunnels mais à de simples opérations de nettoyage. Les tunnels sont systématiquement mal entretenus.

Les structures de base des tunnels sont à chaque fois négligées. On les a simplement  » oubliées « . C’est ce qu’a laissé entendre au Tijd Marc Peeters, président de l’ADEB-VBA, l’Association des Entrepreneurs belges de grands Travaux. Car si les tunnels sont déjà vieux (ils ont été construits dans les années 50), ils sont supposés vivre 100 ans. Mais pour cela, il faut bien les entretenir. Ce qui n’a pas été le cas.

Un choix politique

Tout porte à croire que cette situation est uniquement le résultat d’un choix politique à Bruxelles. Le ministre bruxellois de la Mobilité, Pascal Smet (sp.a), a laissé entendre ce matin sur Radio 1 qu’il s’agissait selon lui d’un  » problème de Bruxelles et de ses voitures « .  » Chaque jour, un nombre impressionnant de voitures rejoint la capitale. D’autres pouvoirs donnent d’énormes subsides aux voitures de société. Il y a une politique fiscale qui encourage à habiter à la campagne et il n’y a pas assez de transports publics dans la périphérie « , a-t-il déclaré. Mais ce qu’il ne dit pas, c’est que le gouvernement bruxellois a utilisé sa (mauvaise) politique de mobilité comme moyen de chantage pour les autres régions et comme moyen de dissuasion pour les automobilistes. Avec pour conséquence d’énormes pertes économiques pour quiconque travaille à Bruxelles.

 » Sur 30 ans, environ 2,5 % des investissements initiaux doivent être consacrés à l’entretien structurel pour conserver un tunnel dans un état optimal. Rien n’est plus important que l’entretien d’un tunnel. Pour une route ou un pont, seul 1 à 1,5 % des investissements de départ suffisent « , a expliqué Marc Peeters, le patron de l’ADEB-VBA. Ce qui n’a jamais été le cas à Bruxelles. En 6 ans, seuls 85 millions d’euros ont été consacrés à l’entretien des tunnels, tandis que 1,4 milliard d’euros ont été investis dans les transports en commun.

Rénover les tunnels

Bizarrement, Pascal Smet reste assez vague sur les coûts totaux de la rénovation des tunnels.  » Entre 500 millions et 1 milliard d’euros « , a-t-il évoqué. Aussi bien Laurette Onkelinx (PS) que Didier Reynders (MR), deux figures de proue bruxelloises, ont suggéré que la Flandre devrait participer aux frais. Mais la N-VA ne veut pas en entendre parler. Car depuis la sixième réforme de l’État, 461 millions d’euros supplémentaires ont déjà été transférés vers Bruxelles, avec pour objectif explicite de compenser les coûts des navetteurs. Ce montant a atteint 135 millions d’euros en 2015 et va encore augmenter.

Pascal Smet lui-même semble dire que l’argent de la Flandre n’est pas nécessaire. Il envisage néanmoins d’introduire des péages. La rénovation des tunnels pouvant être en partie financée par des fonds privés.  » Nous étudions la possibilité d’un partenariat entre le privé et le public. Si nous travaillons avec le privé, un péage n’est pas à exclure. Mais dans tous les cas, nous n’avons pas besoin de l’argent de la Région flamande ou wallonne.  » Un péage conviendrait parfaitement à la politique de dissuasion des automobilistes du gouvernement bruxellois.

Les acteurs économiques n’ont pas tardé à réagir.  » C’est mieux pour tout le monde de quitter Bruxelles « , a lancé Olivier Willocx, le directeur de la Chambre de Commerce de Bruxelles.  » Le fait que trois tunnels s’écroulent n’est ni un accident ni un hasard. C’est uniquement la preuve qu’en vingt ans il n’y a pas eu d’investissement dans l’entretien des tunnels. Cela ne m’importe pas de savoir si ça touche d’abord les navetteurs bruxellois ou flamands. Les gens doivent avoir accès à leur job. « 

La Voka, le réseau d’entreprises flamand, ne mâche pas non plus ses mots :  » Une fermeture des tunnels vers le centre de la capitale serait une catastrophe pour l’accessibilité de Bruxelles. Cela mettrait le rôle de la Région bruxelloise en tant que capitale et centre international sous forte pression. « 

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