Ce mois de juillet a marqué une nouvelle étape dans l’histoire de l’exploration spatiale, avec les vols de Richard Branson et de Jeff Bezos. Le tourisme spatial se développe très rapidement, et il tendra un jour à se démocratiser. Mais suffit-il d’aller dans l’espace pour pouvoir être qualifié d’astronaute ?
Ces derniers jours, certains médias américains n’ont pas hésité à parler des « astronautes » Richard Branson et Jeff Bezos. Les deux milliardaires viennent d’effectuer leur premier vol dans l’espace grâce aux firmes qu’ils ont fondées, respectivement Virgin Galactic et Blue Origin.
Toutefois, il ne suffit pas d’enfiler une combinaison spatiale et de dépasser la ligne de Kármán (la « frontière » entre l’atmosphère terrestre et l’espace, située à 100 km au-dessus de la surface de la Terre selon les normes internationales, à 80,5 km selon les normes américaines) pour pouvoir s’enorgueillir du titre d’astronaute.
Comme l’explique New Scientist, aux États-Unis, il y a trois institutions qui peuvent attribuer ce titre, purement honorifique: l’armée américaine, la NASA et la FAA. Pour être « adoubé » par les deux premières, il faut impérativement être employé par elles. Jeff Bezos, Richard Branson et les futurs touristes de l’espace n’ont donc aucune chance.
Que dit la FAA ?
Reste la FAA, l’agence gouvernementale réglementant l’aviation civile. Ses critères sont un peu moins stricts, bien qu’ils viennent d’être durcis suite à l’accélération de la course commerciale vers l’espace.
La FAA accepte d’appeler « astronaute » des personnes parties dans l’espace via une firme privée… à condition qu’elles y travaillent. Pour les touristes spatiaux, c’est encore raté. En revanche, jusque là, Jeff Bezos et Richard Branson restent en course.
Parmi les autres critères fixés par la FAA, il y a l’obligation d’avoir suivi une formation et d’avoir volé à plus de 80 kilomètres d’altitude. Pour les deux milliardaires, c’est toujours bon.
Reste une ultime condition, et non des moindres. Le candidat astronaute doit avoir « démontré des activités pendant le vol qui étaient essentielles à la sécurité publique ou qui ont contribué à la sécurité des vols spatiaux habités ». Ce critère n’est pas clairement défini: c’est la FAA qui juge s’il a été rempli, au cas par cas. Dans la dernière décennie, seuls les pilotes de vaisseaux spatiaux ont satisfait aux exigences de l’agence. A une exception près, Beth Moses, une cadre de Virgin Galactic qui a volé à bord du vaisseau SpaceShipTwo en 2019.
À priori, il semble que pour être qualifiés d’astronaute par la FAA, les membres d’équipage autres que les pilotes effectuent une tâche quelconque lors du vol, et qu’ils ne soient pas des simples passagers.
Verdict: Bezos n’est pas un astronaute, Branson peut-être
En fonction de ce dernier critère, il apparait clairement que Jeff Bezos ne peut nullement prétendre au titre d’astronaute. En effet, lors du vol de mercredi dernier, le milliardaire et ses trois partenaires n’ont eu qu’à profiter de l’expérience. Le vaisseau dans lequel ils avaient pris place, New Shepard, était entièrement contrôlé depuis le sol.
Seule Wally Funk, l’aviatrice de 82 ans qui a accompagné Jeff Bezos dans l’espace, a peut-être une chance. Elle avait suivi une formation d’astronaute dans les années 1960 mais n’avait pas eu l’occasion d’aller dans l’espace jusqu’à ce mercredi. En vertu d’une exception de la FAA pour les « personnes qui ont apporté une contribution extraordinaire ou un service bénéfique à l’industrie des vols spatiaux commerciaux habités », elle pourrait donc finir par obtenir le titre d’astronaute.
En ce qui concerne Richard Branson, l’équation est plus difficile. Ainsi, lors de son vol du 11 juillet, il a été désigné par Virgin Galactic comme un membre d’équipage testant la fusée, et non comme un simple passager. Cependant, a-t-il réellement contribué à une « activité essentielle à la sécurité » de ce vol spatial habité ? C’est la FAA qui tranchera.
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