Ibrahim El Bakraoui aurait dû être au fond de sa cellule, si le tribunal d’application des peines avait fait son boulot correctement. Le gars a été libéré de manière anticipée après une condamnation pour grand banditisme. Il avait violé les conditions de sa liberté conditionnelle en voyageant vers la Turquie où il a été arrêté, il aurait dû voler en prison à ce moment-là. Mais à ce moment-là, le tribunal de Bruxelles était en retard avec son mandat d’arrêt, c’est donc pour ça qu’El Bakraoui courait toujours.
Le gouvernement a un problème. Il est de plus en plus clair que notre pays a failli dans la lutte contre les terroristes. Et surtout, le ministre de la Justice Koen Geens (CD & V) est en mauvaise posture. Toutes les unes de journaux ce matin poseront la même question: comment est-ce que ce terroriste qui a commis de telles atrocités, Ibrahim El Bakraoui pouvait encore errer comme ça librement? Qui a perdu ce type de vue?
Déjà en juin 2015, les Turques avaient arrêté l’homme à Gaziantep, à la frontière avec la Syrie. La Turquie, qui le détenait comme « combattant étranger », voulait l’extrader vers notre pays. Le 15 juillet 2015, les Turcs envoient donc un fax chez nous. Ils disent qu’ils ont expressément informé la Belgique qu’elle avait un « terroriste potentiel » entre leurs mains, information que Geens ne relève pas apparemment. Quoi qu’il en soit: El Bakraoui demande alors à être renvoyé aux Pays-Bas et non en Belgique, ce qu’on lui donne la permission de faire.
Mais la grande question pour notre pays est: pourquoi la justice n’a-t-elle pas fait son boulot entre temps? Parce que quand même, El Bakraoui est un dangereux criminel qui avait déjà attaqué un bureau de change avec une Kalachnikov. À l’époque il est condamné à croupir dans une cellule pendant 10 ans pour grand banditisme. Mais l’homme n’a pas été jusqu’au bout de sa peine. Après 4 ans et 9 mois de prison, il est en détention provisoire, et il sera ensuite libéré sous certaines conditions.
Un tribunal qui a mauvaise réputation
Contre tous les avis négatifs, le tribunal d’application des peines bruxellois décide quand même de le faire. Le ministre de la Justice Koen Geens explique que les tribunaux fonctionnent de manière autonome. Mais le fait est que ce tribunal a vraiment une mauvaise réputation. C’est ce que le Professeur en criminologie Brice De Ruyver dit dans Het Laatste Nieuws.
Le tribunal fonctionne de manière discutable, comme en témoigne la façon dont le dossier El Bakraoui a été géré. Car l’homme avait reçu des conditions claires pour sa libération conditionnelle: pas plus d’un mois à l’étranger et il devait voir son assistant judiciaire tous les mois.
Il commence à violer les termes de sa libération en manquant quelques rendez-vous avec son assistant. Il reste dans le coin jusqu’en mai 2015. Mais en juin, plus aucune trace de lui, il est en Turquie, ce que le tribunal d’application des peines ne sait apparemment pas. Cela prend jusque août 2015 pour que le tribunal réitère alors sa condamnation et délivre un mandat d’arrêt contre lui. Mais l’oiseau s’est déjà envolé aux Pays-Bas, qu’il atteint via l’aéroport Schiphol. Une fois arrivé là-bas, il disparait des radars.
« Je ne suis pas bien placé pour critiquer un tribunal d’application des peines »
« Il est vrai que ce n’est pas facile, pour les personnes qui ne respectent pas leurs conditions de liberté conditionnelle, comme ça a été le cas avec Bakraoui, de les faire revenir dans leur cellule », a répondu Koen Geens dans les studios de la VRT. « Je ne suis pas pas bien placé pour critiquer un tribunal d’application des peines. Nous nous sommes battus longtemps pour que l’application des peines soit donnée aux mains de juges indépendants. Et comme c’est ce qui s’est passé, le ministre doit l’accepter. »
À toutes les critiques négatives, Geens réagit: « Je dois laisser faire la justice, mon administration a sans doute conseillé judicieusement, le tribunal d’application des peines a donc décidé judicieusement lui aussi. »
