Et si on arrêtait de prendre les étudiants en stage pour des pigeons en Belgique?

Le stage est devenu l’un des passages obligés dans de nombreuses filières de l’enseignement supérieur pour valider son année. Cette période dure généralement plusieurs mois, durant lesquels les étudiants effectuent souvent le même travail que les autres salariés de l’entreprise, mais sans avoir les mêmes droits qu’eux. Un problème que la France a tenté de régler, contrairement à la Belgique.

Si tu es en plein dans tes études supérieures, tu vas peut-être devoir trouver un stage à un moment donné. Durant cette période (de 1 à 4 mois), tu n’iras plus en cours, mais tu seras pleinement intégré à une entreprise pour avoir un aperçu de ce qui serait possiblement ton futur métier.

Tu seras sûrement amené à effectuer les mêmes taches (à peu de choses près) que les salariés de cette entreprise. Mais par contre, n’ayons pas peur des mots: tu seras, parfois, un peu considéré comme un pigeon. Les problèmes ou abus liés aux stages sont dénoncés depuis plusieurs années en Belgique, mais rien n’a changé.

Un travail gratos la plupart du temps

Concrètement, quand tu vas en stage, il y a juste une convention signée entre toi, ton établissement scolaire et ton lieu de stage. Cela te permet de bénéficier du statut de stagiaire, mais c’est tout, comme le regrette Maxime Mori, président de la Fédération des étudiants francophones.

« Il n’y a aucune protection sociale qui existe pour les étudiants stagiaires en Belgique. Aussi, il n’existe aucune convention de stage type. Cela peut parfois poser des problèmes: il n’y a pas de conditions de lieu de travail, d’horaires ou de rémunération », nous explique-t-il. Des abus peuvent aussi avoir lieu, comme « travailler le week-end ou à pas d’heure (ce qui est interdit par la législation, ndlr), ou faire des choses qui n’étaient pas prévues dans le stage », ajoute-t-il. Le pire dans tout ça? Généralement, il faut faire ça gratos.

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Car les stages ne sont souvent pas pas payés, il ne faut pas déconner. « Il y a un défraiement qui peut être fait avec un remboursement des frais, comme le transport ou la nourriture. Mais ça reste aussi un travail qui est fait non rémunéré dans pas mal de cas », explique toutefois Maxime Mori. Mais toutes les entreprises ne défraient pas les stagiaires, puisque ce n’est pas obligatoire.

523 euros par mois en France

En France, les problèmes liés aux stages existent aussi. De nombreux abus sont souvent dénoncés, avec des stagiaires exploités, utilisés comme des membres à part entière de l’entreprise sans pour autant en avoir le statut… ni la rémunération ou les droits. Une nouvelle loi est pourtant entrée en vigueur en septembre 2015 pour mieux encadrer les stages.

Ceux-ci ne doivent plus dépasser 6 mois et doivent être rémunérés dès le 2e mois de présence du stagiaire, qui doit gagner au minimum 523 euros par mois. Le stagiaire doit également bénéficier de tickets restaurant s’il y en a dans l’entreprise (sans avoir à cotiser) et doit se faire rembourser au moins de moitié ses frais de transports, comme les autres employés. Autre « plus » bien sympa? La possibilité d’avoir des congés sous certaines conditions. Les contrôles ont été renforcés et les entreprises qui ne suivent pas la loi s’exposent à des amendes plus importantes.

Alors bien sûr, la France n’est pas le pays des Bisounours pour autant et des abus existent toujours autour des stages. Par exemple, des employeurs ne prennent plus de stagiaire plus de deux mois pour ne pas avoir à les payer. Ou alors ils leur offrent deux stages de deux mois, avec une période de carence d’une semaine entre les deux, pour encore esquiver la rémunération. Mais le couperet peut toujours tomber sur les entreprises qui abusent grâce à cette loi.

Immobilisme des politiques en Belgique

Si la France a voulu mieux encadrer les stages, pourquoi la Belgique ne le ferait pas? Du côté de la FEF, les demandes sont toujours les mêmes depuis plusieurs mois, preuve de l’immobilisme des politiques à ce sujet. Comme nous l’explique Maxime Mori, il faudrait:

– « mettre en place des critères clairs dans les évaluations de stage, qui seront discutés au préalable entre toutes les parties », pour permettre aux étudiants de réussir au mieux leur période de stage;

– « permettre la création d’une instance de recours en cas de litiges concernant un stage », afin que les étudiants puissent se défendre en cas d’abus reconnus;

– « instaurer une deuxième session dans le cas où l’étudiant a raté son stage », car cet échec n’est pas toujours basé sur des critères clairs et le stage est parfois la seule « matière » que l’étudiant doit repasser… l’année suivante;

– « le remboursement des frais de transport pour le stage », qui serait donc le minimum selon la FEF: il n’est pas question pour le moment de réclamer une quelconque rémunération comme en France.

La balle est notamment dans le camp de Jean-Claude Marcourt (PS), le ministre wallon de l’Enseignement supérieur…
EPA
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