Daech veut mettre l’Espagne dans sa poche et s’attaquer à ses touristes

Dans une nouvelle vidéo, Daech annonce qu’il veut maintenant s’attaquer à l’Espagne. Son but : annexer l’Espagne avant 2020, qu’elle fasse partie (à nouveau ?) de son cher califat.  » La petite fille égarée va retourner auprès de papa  » : voici comment l’EI parle de l’Espagne, qu’il appelle aussi Al Andalus. Des vidéos comme celle-là, on en voit souvent, mais voici pourquoi, il faudrait quand même prendre ces menaces au sérieux. 

 » Nous allons reprendre notre terre des envahisseurs  » dit l’EI dans sa nouvelle vidéo. Sur les réseaux sociaux, les partisans de Daech montrent une certaine obsession pour l’Espagne. Mais cette fois-ci, il semblerait que la vidéo soit partie directement du quartier général de l’Etat islamique. C’est officiel, donc.

Le timing de la publication de cette vidéo est intéressant aussi : il y a trois semaines, les forces espagnoles ont mené une opération de grande envergure contre les djihadistes et 90 suspects se sont fait serrer. L’EI réagit, donc !

Dans la vidéo, on voit que la côte de la Péninsule ibérique est délibérément coloriée en rouge. Et ce n’est pas un hasard ! Car les menaces proférées par l’EI sont clairement dirigées contre les touristes qui peuplent en permanence les côtes espagnoles. Ils sont considérés comme étant  » le talon d’Achille de l’Espagne « . Qui ne va pas lui-même, ou n’a pas un pote qui va à la Costa Del Sol, ou à la Costa Brava au moins une fois par an ?

 » L’Espagne est à nous « 

Quand le groupe islamiste parle de l’Espagne, il utilise ce terme : Al Andalus. C’est le nom que portait le territoire espagnol quand il faisait encore partie du califat au Moyen Age. Sur les réseaux sociaux, les partisans de l’EI postent de plus en plus de photos canons de l’Alhambra à Grenade ou de Mesquite à Cordoba qu’ils accompagnent de propos prophétiques et religieux. Ils suivent les idées de Daech et parlent de l’Espagne en disant  » Elle est à nous « . They want it back!

Et bien oui, les musulmans ont quand même été  » propriétaires  » de l’Espagne pendant de nombreux siècles. Et ils (certains d’entre eux visiblement) n’ont sans doute pas digéré de s’être fait mettre dehors par la suite. Pour la petite histoire, ils sont arrivés en 711, ont été vaincus en 1492 par Ferdinand et Isabelle, et ce n’est qu’en 1614, que tous auront finalement été dégagés de l’Espagne.

L’Espagne tire la sonnette d’alarme

C’est sûr que ça pique quand on entend des choses du genre :  » Nous allons nettoyer avec du sang les monuments de nos ancêtres « . Mais, malgré ce discours musclé, il y a des aspects pratico-pratiques qui peuvent nous faire garder la tête froide. Les chances pour que Daech envahisse l’Espagne – comme les musulmans l’avaient fait en 711 – même si le groupe est de plus en plus présent en Libye, sont quand même vraiment maigres. Parce que, il ne faut pas oublier que l’OTAN est présent, et que l’armée espagnole compte près de 125.000 soldats. En sachant que l’EI ne compte  » que  » 35. 000 combattants. Mais alors, tout va bien !

Non, pas vraiment. L’EI pourrait quand même causer beaucoup de misère à l’Espagne, et impacter le pays via d’autres canaux. Il y a de nombreuses raisons à cela et notamment : le problème de la radicalisation des jeunes devenu incontrôlable.

Ceuta : un djihadiste est libre tant qu’il est dans le port franc

Pour bien comprendre, il existe une enclave dans le Maroc, et c’est Ceuta. Et Ceuta, c’est un port franc, c’est-à-dire une zone libre, dépourvue de tout contrôle douanier, etc. C’est un territoire espagnol considéré comme faisant partie de l’Union européenne, mais il n’est pas soumis à l’impôt européen. Chaque année, c’est environ un million de touristes qui se ruent dans les boutiques de cette véritable zone  » duty free « . Mais Ceuta, c’est aussi la capitale officieuse du djihad en Europe… Sur les 80.000 habitants de Ceuta, 12.000 vivent dans un quartier appelé  » El Principe « , un quartier un peu, voire très très chaud.

El Principe, c’est un état libre dans ce port franc – parmi les habitants de ce quartier, qui sont principalement musulmans, 80 % sont des immigrants illégaux. Le taux de chômage, n’en parlons pas, ou si, il est de… 90 %. Des bandes criminelles impliquées dans la drogue et dans la contrebande de personnes font régner la loi. Facile de trouver des armes : 200 euros, et hop, un pistolet dans la poche. La police espagnole a même avoué ne plus oser mettre les pieds dans ce quartier d’El Principe.

 » Notre Syrie, mais de l’autre côté de la mer « 

El Principe, en plus d’être un repère de criminels, est également un foyer du djihadisme. La chaîne espagnole Antena 3 TV s’est récemment risqué à pénétrer dans ce quartier et en est revenu avec un reportage troublant. Il ne montre pas seulement que la majorité des jeunes musulmans sont séduits par le combat que mène Daech, mais aussi, que leur ambition n’est pas d’aller combattre en Syrie ou en Irak. Comment ça ?  » Nous menons notre djihad à Ceuta. Notre Syrie à nous, de l’autre côté de la mer « . En d’autres termes, ils parlent d’Al Andalus, l’Espagne, leur propre terre de djihad.

La Catalogne est le plus gros problème

Fin novembre, à Ceuta, la police anti-terroriste espagnole a arrêté trois djihadistes lors d’une opération spectaculaire. Apparemment,  » ils étaient sur le point de commettre des attentats en Europe « , a expliqué la police espagnole. Ils avaient bien pris le temps de construire une énorme cache d’armes, et se disaient prêts  » à se sacrifier « , des martyrs en somme.

Melilla, une autre enclave espagnole et est aussi un point sensible. Mais, même si cela peut paraître surprenant, le plus gros problème vient de la Catalogne. Les Fuerzas de Seguridad admettent que ces dernières années, la majorité des ressources y ont été déployées. La Catalogne est considérée comme le premier foyer de l’islam extrémiste en Espagne.

 » 450. 000 musulmans dont 20 % qui montrent des signes de radicalisation « 

Plus ou moins 450. 000 musulmans vivent aujourd’hui en Catalogne. Selon Jofre Montoto,  » experto de investigador et terrorismo isla Mista « , et analyste au Centro de Estudios Estratégicos de Catalunya, 20 % de cette population musulmane montre des signes de radicalisation, un chiffre beaucoup plus élevé que dans le reste de l’Europe. Selon une recherche qu’il a faite pour le compte du gouvernement, 10 % d’entre eux représenteraient un  » danger sérieux « . Toujours selon Montoto, tous sont convaincus que le djihad doit être mené sur le sol espagnol.

 » Barcelone, le coeur européen du salafisme « 

Manuel Torres, de l’Université Pablo Slavide, a mené des recherches pour voir comment les musulmans de Catalogne agissent sur le net. Sa conclusion : 2500 cas représentent vraiment un danger dans la région. l’EI se radicalise de plus en plus dans l’actualité, mais en réalité, en Catalogne, ce phénomène ne semble pas être nouveau.

D’après des documents révélés par Wikileaks, déjà en janvier 2007, les agences de renseignement occidentales considéraient Barcelone comme étant le  » coeur européen du salafisme « . Les Américains avaient déjà averti les autorités espagnoles en 2004 que les Djihadistes recrutaient en abondance dans la région de Barcelone.

Kafir et Takfir

Selon Óscar Pérez Ventura, un professeur qui travaille pour le CISDE (para Campus Internacional la Seguridad y Defensa) Takfir wal-Hijra a profité massivement des sentiments anti-américains et anti-espagnoles, présents au sein de la population musulmane catalane. Des sentiments qui se sont développés quand le pays a participé aux opérations menées en Irak au lendemain du 9/11. Takfir wal-Hijra est une organisation terroriste islamiste, qui opère dans plusieurs pays d’Europe et au Moyen-Orient. Si on traduit le nom, cela veut dire quelque chose comme  » excommunication et émigration « . Mais il faut bien comprendre ce qu’est takfir. Takfir désigne le kafir (infidèle) comme était une personne ou un groupe de personnes. Donc les non-musulmans mais aussi des musulmans qui se sont rendus coupables d’apostasie (ils ont la même valeur aux yeux du groupe donc) peuvent être considérés comme kafir. u coup, selon les définitions ultra strictes du groupe de  » bon musulmans « , la plupart des musulmans sont vus comme des kafir.Le mot hijra, qui fait partie du nom du groupe, fait référence au Hijra que Mohammed et ses disciples ont fait en 622, lorsqu’ils ont déménagé de la Mecque à Médine. Le sens à voir ici, est le fait qu’il faut considérer que la pureté de l’islam, sépare le musulman du reste de la société. L’idéologie du groupe, influencée par le salafisme et le wahhabisme, a été développée par Abu Muhammad al-Maqdisi Asem, un Palestinien arrêté en Jordanie en 1994.

 » Ils vont au bordel, se saoulent, prennent de la coke. Ils mangent du porc, et s’interdisent d’aller à la mosquée « 

Cette découverte faite par le professeur Ventura est très importante, car on comprend mieux pourquoi l’Espagne est un peu coincée et qu’elle alerte le reste du monde de plus en plus fréquemment. Non seulement, elle se rend compte que le danger vient d’abord de l’intérieur du pays, mais surtout qu’il est de plus en plus difficile d’identifier les cas vraiment dangereux.

Takfir wal-Hijra proclame haut et fort que c’est ok, qu’il cautionne, que les musulmans pieux et se frottent aux  » coutumes occidentales  » puisque l’objectif ultime est de  » détruire la société occidentale « . Les partisans sont donc autorisés à se raser la barbe, boire de l’alcool, aller dans des bar à putes…

Les forces de sécurité espagnoles déclarent que c’est souvent pour cette raison qu’il est sans espoir de les démasquer. Parmi plus de 200 terroristes arrêtés en Espagne depuis 2004,  » la majorité vivaient vraiment comme des Espagnols. Ils vont au bordel, se saoulent, prennent de la coke. Ils trempent souvent dans des affaires de drogue, ils mangent même du porc et s’interdisent même d’aller à la mosquée.  » Comment peut-on dès lors espérer les démasquer !

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