À la sortie de son discours tenu lors de l’Assemblée générale des Nations unies, le Premier ministre nous a accordé une interview sous forme de bilan. Tant sur le plan international qu’intérieur, Charles Michel est convaincu que la Belgique a progressé sous sa législature.
On est ici à New York, dans le cadre de l’Assemblée générale des Nations unies. La Belgique va bientôt entrer dans le Conseil de sécurité. Elle entre donc dans la cour des grands ?
En tout cas oui, pour les deux prochaines années, la Belgique va entrer dans la cour des grands. C’est bien pour l’image de la Belgique, mais aussi pour sa capacité à défendre ses valeurs au sein de l’Union européenne. Puisqu’en siégeant dans le groupe restreint des membres qui sont présents au Conseil de sécurité, elle va être amenée chaque fois à exercer une influence très directe sur les questions essentielles pour l’avenir de la planète: le changement climatique, la lutte contre le terrorisme, la question des armes nucléaires ou des armes chimiques… Ce sont de grands enjeux qui mettent en scène de grandes puissances, des enjeux sur lesquels nous allons exercer une influence.
Déplaçons-nous de quelques milliers de kilomètres pour retourner en Belgique: la question qui fâche pour l’instant est celle des réacteurs nucléaires. Pouvez-vous assurer, ici, qu’il n’y aura pas de black-out cet hiver ?
Nous sommes au travail, et c’est un travail qui est très important. Il y a quelques jours, la ministre de l’Énergie a pris connaissance que certains travaux dans les centrales allaient être prolongés. Immédiatement, des mesures ont été prises pour tenter de garder la situation sous contrôle. C’est le travail qui est mené, c’est le travail qui doit être réalisé. Et nous allons effectivement tout mettre en oeuvre pour maîtriser cette situation.
Comment éviter que ce problème se répète chaque année à la même époque ?
La question de la stratégie énergétique est une question fondamentale. Et qui ne permet pas les simplismes et la démagogie. Nous avons fait un choix cohérent de sortie ordonnée, progressive de l’énergie nucléaire. Nous sommes confrontés, c’est vrai, à un obstacle de taille, un obstacle sérieux et nous travaillons pour résoudre la situation. Ça, c’est la philosophie. Mais nous voyons les simplismes de certaines formations politiques qui sont toujours les mêmes. Celles qui nous expliquent, qu’en un simple claquement de doigts, on va sortir du nucléaire. On voit que quand nous n’avons pas de centrale nucléaire, cela marque les esprits et cela impacte la sécurité de l’approvisionnement. J’appelle chacun à être un peu plus modéré et plus sérieux dans ses analyses.
Quel bilan tirez-vous de votre législature sur le plan personnel?
Sur le plan purement personnel, j’ai tenté de faire du mieux possible pour mettre en oeuvre un programme de redressement économique, de création d’emplois et de relance des investissements. Et de ce point de vue là, personne ne peut contester que les résultats engrangés sont gigantesques. Jamais, depuis très longtemps, autant d’emplois n’ont été créés en Belgique, jamais un ajustement budgétaire n’a porté autant ces résultats aujourd’hui. Sur le plan personnel, il y a eu des obstacles, des attaques parfois en dessous de la ceinture. La violence est normale dans le débat politique, mais je tenterai chaque fois de garder mon calme et de faire en sorte de garder la tête froide, pendant que d’autres perdront la leur.
Contre les critiques vous dites souvent que le MR a pu appliquer 80% de son programme…
Cela fait des années que nous tentons la mise en oeuvre de notre programme économique. Un programme qui soutient les entreprises quotidiennement, petites et grandes, qui fait en sorte que le marché du travail soit spontané, qui s’adapte aux nouvelles exigences de la vie en entreprise et de la vie familiale.
Cela fait des années que nous demandons plus de fermeté en termes de sécurité aussi. J’ai toujours milité pour que la question de l’immigration soit traitée de façon ordonnée, pas de manière désordonnée comme cela a déjà été le cas en Europe par le passé. Sur tous ces sujets-là, nous avons largement réalisé notre projet et nos propositions, dans le cadre d’une majorité politique qui présente une cohérence sur le plan programmatique, mais qui, c’est vrai, a eu des débats, à l’intérieur, intenses, passionnés et passionnants. C’est aussi ça la démocratie.
Justement, sur cette question migratoire qui a marqué cette législature, vous avez le sentiment qu’elle a été traitée avec trop d’émotion au sud du pays, notamment par la presse?
Je ne fais pas de distinction entre le nord, le centre ou le sud du pays. Je constate simplement que nous avons fait ce que nous devions faire, c’est-à-dire être très humain dans la mesure où l’ensemble des règles de droit international ont été respectées. Et nous allons continuer à les respecter.
Je voudrais mettre en évidence qu’en 3 ans, 45.000 personnes ont reçu de la part de la Belgique la protection nationale, c’est bien plus que ce qui a été fait par le gouvernement précédent. Mais dans le même temps, les personnes qui ne sont pas dans les conditions reconnues par le droit international, elles doivent être rapatriées. Si on n’est pas clair sur ce sujet-là, cela veut dire que le doute est ouvert, qu’il suffit de venir chez nous de manière illégale ou irrégulière pour pouvoir s’installer définitivement et durablement. Ce n’est pas raisonnable, ce n’est pas responsable et je n’entends toujours pas de la part de ceux qui sont très sévères à l’égard du gouvernement, des alternatives un tout petit peu réalistes par rapport à ce que nous faisons depuis quatre ans avec ce gouvernement.
Et par rapport à la prochaine législature, quels dossiers peuvent encore avancer d’ici mai prochain?
Continuer à mettre en oeuvre les accords pour plus d’emplois. Il y a trop d’emplois vacants, c’est un paradoxe. Il y a encore trop de chômage à certains endroits. Nous devons davantage soutenir et appuyer les demandeurs d’emploi pour qu’ils aient le plus de chances possibles pour décrocher un job. C’est toujours un sujet très important pour nous.
Continuer à mettre en oeuvre la sécurité chez nous en Belgique, en partenariat avec nos pays amis, notamment au travers de ces investissements que nous avons fait. Des décisions doivent encore être prises avant la fin de la législature.
Et puis continuer, avec beaucoup d’énergie, à concrétiser ce qui nous tient à cœur. Ne pas investir convenablement et massivement dans certains secteurs d’activité, c’est la garantie d’un appauvrissement plus tard. C’est le report d’une dette pour nos enfants, et cela, je ne le veux pas. C’est le sens du travail qui est mené. Avec des femmes et des hommes d’expérience qui sont à nos côtés pour identifier la manière de stimuler, demain, davantage encore d’investissement.
Définitivement partant pour un gouvernement Michel II?
Cette question, elle tout à fait prématurée. Car je suis cohérent jusqu’au dernier jour. Et au moment de la campagne électorale, ce sera le grand débat démocratique et ce sera le moment pour les partis politiques d’énoncer leurs priorités pour l’avenir de ce pays.