Bon, c’est qui madame Erdogan? Une dame aux goûts de luxe qui se bat pour les droits des femmes… dans le dos de son mari

Derrière chaque homme fort, se cache une femme encore plus forte, dit-on souvent. Cela peut en partie se vérifier avec Recep Tayyip Erdogan. Partout où le président turc se rend, sa femme Emine l’accompagne. On ne l’a encore jamais entendu dire ou faire quoi que ce soit, si ce n’est agiter la main vers la foule. Elle semble discrète, mais elle n’est pourtant pas passive…

À 62 ans, Emine Gülbaran a commencé sa vie dans le district de Siirt, une région très traditionnelle du sud-est de la Turquie. Elle est née et a grandi au sein d’une famille nombreuse de classe moyenne qui était convertie au shafisme. Il s’agit de l’un des quatre rites du sunnisme qui prône une interprétation conservatrice et stricte de la religion.

Mais à la place, elle s’est forgée une vision plus « moderne » de la société et des moeurs. Ce qui lui permet de serrer la main des chefs d’État et des autres femmes moins conservatrices.

Elle n’a obtenu aucun diplôme, bien qu’elle serait passée par l’école d’art Mithat Paşa Akşam. C’est en 1978 qu’elle a rencontré et épousé Recep Tayyip Erdogan, alors qu’elle était militante dans une association islamiste. Elle a eu avec lui quatre enfants, deux filles et deux garçons: Ahmet, Necmettin, Esra et Sümeyye.

En tant que First Lady, elle s’est surtout engagée dans la cause féminine. Cela peut sembler banal pour une femme de président, mais son influence est tout autre que celle qu’a exercée Michelle Obama, par exemple. Du fait de la position d’Erdogan sur les femmes: « Notre religion a défini une place pour les femmes [dans la société]: la maternité ».

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Une féministe conservatrice

Dans sa jeunesse, la femme d’Erdogan faisait partie de la « Idealist Women’s Association« . Mais attention, ce n’est pas exactement à quoi tu t’attendrais. Le féminisme d’Emine est plus flou.

Il est vrai qu’elle défend certains droits des femmes et s’en occupe jour après jour. Elle a, par exemple, pris position contre le mariage des enfants, ce qui n’a pas été apprécié partout dans le monde islamique.

Mais d’un autre côté, elle a tenu pas mal de discours très rigides. L’année dernière, elle a notamment dit que « les jeunes filles ont acquis des compétences importantes à partir des harems », pendant la période ottomane. Cette déclaration a fait le tour du monde, mais peu de gens ont souligné le fait qu’Emine a prononcé ses mots, essentiellement pour soutenir son mari. Car le rêve d’Erdogan est de reconstituer une sorte d’Empire ottoman.

D’où le fait que madame Erdogan n’ose s’imposer davantage comme une féministe. C’est ainsi: elle doit défendre, avec son mari, des valeurs conservatrices, tout en restant calme et discrète. Bref, une épouse et mère exemplaire. On peut donc la qualifier de « féministe conservatrice », puisqu’elle soutient les femmes… mais en marchant sur des oeufs.

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Des goûts de luxe

Mais cette image de femme idéale, qui sent bon le citron et qui fait briller la cuisine, a été un peu entachée par une virée shopping hors du palais spacieux. Et celle-ci a bien sûr fuité dans les médias.

En octobre 2015, Emine Erdogan était en visite à Bruxelles avec son mari. Elle s’y est fait remarquer en faisant bloquer, par son service de sécurité, de nombreux magasins de l’avenue Louise pendant près d’une heure.

D’un autre côté, elle est une grande spécialiste de thé blanc. Ce breuvage est facile à trouver en Turquie, mais il peut coûter jusqu’à 1.800 euros le kilo. Et puis, la résidence Erdogan, le fameux « palais blanc » de 200.000 mètres carrés, a lui coûté environ 277 millions d’euros.

Le pire, c’est que personne n’a aucune idée d’où vient l’incommensurable fortune de la famille Erdogan. D’autant plus que le salaire annuel du président turc est estimé à environ 50.000 euros, pas plus. Recep Tayyip Erdogan tire certes des recettes de ses investissements et biens immobiliers, mais à nouveau, ceux-ci sont très flous.

En tout cas, ils ne servent pas à soutenir la population. Les chiffres de l’Union européenne, tirés d’une enquête du Centre d’économie et de recherche sociale de l’université de Bahcesehir à Istanbul, sont interpellants à ce sujet: deux enfants sur trois en Turquie vivent dans la pauvreté…

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