Attention danger: le dopage mécanique est le nouveau fléau du cyclisme

Femke Van den Driessche va entrer dans l’histoire. La jeune Belge de 19 ans est la première à s’être faite attraper avec un moteur caché dans son vélo, à l’occasion des Championnats du monde de cyclo-cross le week-end dernier. Le « dopage mécanique » n’est donc pas une légende et le cyclisme mondial va désormais devoir lutter contre ce fléau.

Elle a eu beau pleurer au moment de s’expliquer, Femke Van den Driessche risque gros. La Belge de 19 ans pourrait prendre au moins 6 mois de suspension et jusqu’à 200.000 euros d’amende pour avoir triché lors des Championnats du monde de cyclo-cross. Son cas de dopage est historique. Ce n’est pas elle qui s’est directement dopée, mais son vélo. On a retrouvé un moteur caché dans son vélo. Ou plutôt « le vélo d’un ami » sur lequel elle s’est retrouvée par erreur. Une excuse pas très convaincante. Le « dopage mécanique » ressemblait à une blague il y a encore quelques années. C’est désormais une réalité face à laquelle l’UCI, qui gère le cyclisme mondial, va devoir réagir.

Cancellara et Froome accusés

Les craintes autour de la fraude technologique sur les vélos ne datent pas d’hier. Depuis plusieurs années, des voix s’élèvent pour dire: « Attention, ce pas une légende ». On en a eu la preuve ce week-end. Triste que ce soit tombé sur une Belge, lors d’une course internationale se disputant… en Belgique. Femke n’est sûrement pas la première à avoir utilisé un vélo avec un moteur. Elle est juste la première à s’être fait attraper.

Les stars Fabio Cancellara ou même Chris Froome, vainqueur du Tour de France, ont déjà été accusées d’utiliser des vélos à assistance mécanique. En 2014, sur une vidéo, on voyait la roue du vélo de Ryder Hesjedal qui continuait à tourner… alors que le cycliste s’était déjà cassé la figure et était par terre. Du coup, l’UCI fait gaffe maintenant. Les contrôles aléatoires des vélos sont renforcés et se multiplient. C’est d’ailleurs comme ça que Femke Van den Driessche a été rattrapée par la patrouille alors qu’elle avait abandonné.

3.000€ et difficile à détecter

Pour posséder un vélo à moteur, pas besoin de rouler sur l’or. Le vivax Assist permet par exemple « de transformer votre vélo de course avec un moteur invisible » pour la modique somme de 3.000€. A ce prix, vous obtenez une batterie qui tient dans une sacoche et un chargeur. Le moteur est caché sous le vélo et vous n’avez qu’un bouton à actionner pour donner plus de puissance à votre coup de pédale. Poids total du système: 1,8 kilos. Un système encore plus performant sans fil est disponible. De quoi impressionner vos amis le dimanche matin sur les routes wallonnes.

Le problème, c’est que cette technologique est difficile à détecter sans un contrôle minutieux du vélo. Ce genre de moteur est accessible à tous. Vous imaginez bien que les stars du peloton, si elles doivent tricher, ne peuvent pas se contenter de faire comme Monsieur tout le monde. Non, il existe des systèmes bien plus perfectionnés.

Commutateur caché

Si vous ne connaissez pas Istvan Varjas, retenez bien son nom. Car cet ingénieur hongrois pourrait bien être derrière le prochain scandale du dopage technique: c’est lui qui propose les vélos motorisés les plus performants du marché. Le journal français l’Équipe l’a rencontré en avril 2015. Il produit près d’une dizaine de vélos motorisés par an. Là aussi, le principe est simple : un petit commutateur sous les freins et votre vélo accélère d’un coup et peut atteindre une vitesse que vous n’auriez jamais imaginé avec vos petites jambes. En toute discrétion en plus. Au début, le problème était le bruit. Varjas a réussi à rendre son vélo à moteur silencieux. Révolutionnaire.

Plusieurs coureurs du peloton pourraient être équipés du système de Varjas, comme il le laisse entendre à chacune de ses interviews. Ce système s’installe très facilement: Varjas prend le cadre du vélo « l’emporte, le scie, installe le moteur, recolle le cadre, le ré-émaille dans sa couleur originelle », écrivait l’Équipe. Super facile quand on est rodé. Le prix? De 100.000 à 150.000 euros. Un coût que seul les cyclistes professionnels peuvent assumer. Un sacré investissement qui peut rapporter gros si la victoire est à la clé. Moins d’efforts, plus de vitesse : que demande le peuple?

Le souci est que Varjas est peut-être le plus connu, mais il ne serait pas le seul sur le marché à proposer ce genre de vélo. La technologie proposée s’est en plus encore développée. Par exemple, sur les vélos de Varjas, le moteur se coupe instantanément en cas de chute, histoire d’éviter que tout le monde voit les pédales tourner alors qu’il n’y a personne sur la selle. Encore plus petite, encore plus efficace et encore moins détectable, l’assistance mécanique risque d’être le nouveau fléau du cyclisme mondial. Enfin « nouveau », pas vraiment en fait, puisque certains affirment que cela existe depuis près de 10 ans.

Comme le dopage

C’est un peu comme le dopage en fait. Tout le monde savait que cela existait dans le cyclisme depuis des dizaines d’années. Personne ne disait rien jusqu’au moment où la gruge était trop flagrante. Les produits permettaient aux coureurs de réaliser des performances bien trop grosses pour que le public y croient. Les contrôles se sont renforcés et sont devenus plus efficaces, des scandales ont éclaté, l’EPO a été bannie. Tout le monde est gentil, sinon la porte c’est par ici.

Avec l’affaire Van den Driessche, l’UCI n’a plus le choix. Il va falloir durcir l’arsenal pour lutter contre le dopage mécanique. Les contrôles et le démontage des vélos ne vont plus suffire contre une triche de plus en plus efficace. Greg LeMond, vainqueur du Tour de France en 1989 et 1990, avait demandé l’utilisation d’un pistolet thermique pour détecter les sources de chaleur. Sur le Tour d’Italie, une brigade était spécialisée dans la recherche de champs magnétiques et donc d’un système de triche mécanique sur les vélos. Sur le papier, ça envoie du lourd. A condition que les tricheurs ne trouvent pas la parade rapidement.
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