Plus le choix: la BCE doit tenir compte des cryptos dans les moyens de paiement

Le paysage des paiements a subi des changements notables dans la zone euro. La nouvelle étude de la Banque centrale européenne (BCE), suivant l’attitude des consommateurs en la matière, n’a donc plus pu faire l’impasse sur les actifs crypto.

Pourquoi est-ce important ?

Même si la méthodologie et les conclusions de cette enquête de comportements peuvent être débattues en ce qui concerne les cryptos, la démarche de la BCE permet de quantifier les avoirs en actifs numériques et l’utilisation qui en est faite dans la zone euro. Suivre de près ces tendances demeure naturellement essentiel pour la banque centrale. Émettrice de l’argent public et gardienne du bon fonctionnement des systèmes financiers, la BCE a la responsabilité de veiller à l’accessibilité des moyens de paiement. Avec la transformation digitale, l’institution monétaire cherche à cerner la pertinence d’un euro numérique aux côtés du cash.

L’essentiel : Les nouvelles données récoltées dans le cadre de SPACE (Study on the payment attitudes consumers of consumer in the euro area) donnent un ordre de grandeur de la possession de crypto-actifs et de leur utilisation à des fins de transactions ou d’investissements.

  • L’impact des cryptos sur l’ensemble des paiements est un élément nouveau qui n’avait pas été objectivé dans la précédente étude (SPACE avait été menée pour la première fois en 2019).
  • « Depuis lors, les cryptos ont commencé à s’infiltrer de plus en plus dans le courant dominant », reconnaissent les rapporteurs de la BCE.
  • Deux phénomènes principaux expliqueraient cette adoption:
    • « Les vastes effets des restrictions liées à la pandémie ont probablement aidé. »
    • « Une plus grande clarté quant à leur traitement réglementaire en Europe a probablement influencé l’attitude des consommateurs. »
  • Les développements ont été tels que la Banque centrale européenne reconnaît avoir dû faire le point pour continuer à « les suivre de près. »

« L’adoption par le grand-public reste encore faible »

Les 39.765 sondés dans 17 pays de l’Union monétaire devaient d’abord déclarer s’ils possédaient des actifs crypto :

  • La moyenne en zone euro s’élevait à « un modeste 4% de la population », égratignent les rapporteurs.
  • Le taux de possession le plus élevé est enregistré au Luxembourg (>8%). À l’inverse, l’Italie affiche la part la plus faible (2%).
  • À titre indicatif, la BCE enregistre une part de la population portée sur les cryptos inférieure à la moyenne en France (3%) tandis que les proportions sont alignées sur la tendance globale en Belgique et en Allemagne (4%).

On imagine que le directoire de la Banque centrale européenne, viscéralement opposé à Bitcoin & Cie, a trouvé un certain réconfort dans ces statistiques recueillies en plein crypto winter, le secteur traversant des crises majeurs de liquidités et de confiance.

L’étude en profite d’ailleurs pour écorner un peu plus l’image des cryptomonnaies, soulignant le contraste entre ambitions et utilisations.

  • « Malgré l’attention accrue portée aux crypto-actifs, tant dans la culture populaire que sur les marchés, leur adoption par le grand-public est encore relativement faible », épinglent les auteurs.

« Les cryptos continueront de n’attirer que des spéculateurs en quête de paris »

Les répondants qui ont indiqué détenir des cryptos ont alors été interrogés sur l’usage qu’ils en avaient. C’est-à-dire à des fins de paiement, d’investissement ou les deux :

  • Dans la plupart des pays, il y a deux ou trois fois plus de personnes qui possèdent des actifs crypto uniquement à des fins d’investissement.
  • Les variations extrêmes entre pays ne permettent pas aux experts de la BCE de tirer de « conclusions évidentes », est-il avoué dans le document.

En moyenne dans la zone euro, à peine 10% des propriétaires d’actifs numérique les utilisent uniquement pour payer. Et plus de 70% n’utilisent le bitcoin et les autres cryptos que pour investir.

  • En Belgique, plus de 60% des détenteurs de cryptos disent les utiliser exclusivement à des fins d’investissement mais près de 30% en ont un usage mixte, contre moins de 20% en zone euro.
  • En France, l’usage hybride et celui réservé aux paiements concernent tous deux environ 20% des détenteurs.

Dernier élément de langage à souligner, la dimension d’investissement prend une connotation ultra négative dans les communications de la BCE dès qu’elles portent sur les cryptomonnaies. Chaque information portant sur l’industrie du bitcoin transpire souvent de l’opposition idéologique de l’institution monétaire. Pour mémoire, « les cryptos sont fondamentalement défaillantes », tout comme les entreprises opérant dans leur écosystème, avait récemment exposé Fabio Panetta, membre du directoire de la BCE.

  • « Les gens aiment parier. Sur les courses de chevaux, les matchs de football et bien d’autres événements. Et certains investisseurs continueront à parier en prenant des positions spéculatives sur les crypto-actifs », avait-il senti bon d’insister, lui qui n’hésite plus désormais à exhorter les régulateurs à envoyer Bitcoin au bûcher.
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