Au Danemark, les migrants ne sont pas les bienvenus et le gouvernement ne s’en cache pas

C’est ce mardi que le Danemark doit valider un projet de loi polémique sur l’immigration. L’objectif non dissimulé : dissuader les migrants de rejoindre le pays. Les mesures qui seront adoptées sont vivement critiquées par la communauté internationale, mais le gouvernement danois tient dans la tempête.

Le Danemark a accueilli 21.000 migrants sur son sol en 2015. A titre de comparaison, son voisin suédois a ouvert sa porte à 163.000 migrants. Mais ce chiffre reste trop élevé pour le gouvernement danois. Avec le projet de loi de ce mardi, il a bien l’intention de refroidir les migrants désireux de poser ses valises sur son sol.  » Ce que nous disons, c’est que si vous voulez venir en Europe, mieux vaut éviter le Danemark « , a avoué sans concession Martin Henriksen, porte-parole du Parti populaire, anti-immigration et soutien du gouvernement de droite actuel.

Saisie des biens

La mesure la plus critiquée est la saisie des biens des migrants. La police va avoir l’autorisation de fouiller les bagages et pourra saisir l’argent liquide au-delà de 10.000 couronnes (1.340 euros) ainsi que les objets de valeur. Comparé par la presse internationale au régime nazi, qui agissait de la sorte avec les Juifs, le Danemark a lâché du lest. Le seuil initial de 3.000 couronnes a été rehaussé, notamment pour convaincre l’opposition de gauche, et les objets à forte valeur sentimentale comme les alliances ne seront pas saisis. Faut-il préciser que cet argent ne sera pas utilisé pour financer le séjour des demandeurs d’asile ensuite ?

Frais de dossier et niveau élevé en danois

Les demandeurs d’asile sous protection moindre, c’est-à-dire ceux qui fuient leur pays sans qu’une menace directe ne pèse sur eux, devront attendre trois ans avant de demander le regroupement familial. Le délai était d’un an avant. Les permis de résidence ne seront plus de cinq ans mais de deux ans pour les demandeurs d’asile bénéficiant d’une protection plus élevée, ceux ayant quitté leur pays en raison d’une persécution sur leur race, nationalité ou encore religion. Comme si cela ne suffisait pas, le demandeur d’asile devra avoir travaillé 2,5 ans sur les 3 dernières années, payer des frais de dossier d’environ 500 euros pour une demande de permis de résidence permanent, et avoir un niveau élevé en danois.

epa

À l’encontre des conventions internationales

Plusieurs de ces mesures vont à l’encontre des conventions internationales, ratifiées pourtant par le Danemark. Au choix : Convention européenne des droits de l’Homme, Convention internationale des droits de l’enfant et Convention de l’ONU relative au statut des réfugiés. Amnesty International a pointé du doigt le fait que le délai d’attente pour le regroupement familial pourrait  » avoir une incidence dévastatrice sur les familles, y compris sur leur rétablissement après des traumatismes et leur capacité à s’intégrer et s’adapter à la vie dans un nouveau pays « .

Le Haut-Commissariat des Nations unies aux réfugiés a pointé du doigt une réforme  » susceptible d’alimenter la peur et la xénophobie  » en Europe. Mais le Danemark se moque des critiques.  » La politique migratoire danoise se décide au Danemark, pas à Bruxelles « , a balayé Inger Støjberg, ministre de l’Intégration et de l’Immigration. Pour le premier ministre Lars Løkke Rasmussen, c’est plutôt aux conventions internationales de changer et de s’adapter à cette nouvelle donne.

Encarts publicitaires et boulettes de porc

Le sujet de l’immigration est celui préoccupant le plus les Danois à l’heure actuelle selon les sondages. A Sønderborg, une discothèque refuse ainsi l’entrée aux personnes ne parlant ni anglais, ni danois, ni allemand. A Randers, la viande de porc a été rendue obligatoire dans les cantines par le conseil municipal après la « Meatball War », soit la guerre des boulettes de porc. Des contrôles aux frontières ont été rétablis pour empêcher l’entrée des migrants. Autant d’indices sur l’état d’esprit régnant actuellement dans ce pays.

En septembre dernier, le Danemark avait également acheté des encarts publicitaires dans quatre quotidiens libanais. On pouvait y lire que le pays  » avait décidé de durcir les règles s’appliquant aux réfugiés « . Baisse des allocations sociales, obligation de parler danois, difficulté à obtenir le rapprochement familial… : le texte était un avant-goût du projet de loi, sensé refroidir les candidats à l’immigration au Danemark. À croire que cela n’a pas suffi, ou que le pays veut simplement passer à la vitesse supérieure.

Malgré les critiques, ce projet de loi devrait être adopté. Le parti libéral de droite Venstre, au pouvoir depuis le printemps, a le soutien du Peuple danois, parti anti-immigration. Les quelques concessions adoptées dans le texte de loi vont leur permettre d’obtenir les voix des sociaux-démocrates pour avoir la majorité nécessaire à son adoption. La Reine Margrethe II devra ensuite le signer, pour une entrée en vigueur prévue dans les jours à venir. La polémique ne fait que commencer.

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