Deux anciens profs belges tentent d’abolir l’accord du participé passé avec l’auxiliaire avoir et ça s’annonce chaud

C’est le cauchemar de tous les élèves en cours de français: l’accord de participe passé. Avec l’auxiliaire « être », c’est plutôt simple: il s’accorde en genre et en nombre avec le sujet. Mais avec « avoir », c’est une véritable plaie. Deux anciens profs belges militent donc pour abolir l’accord du participe passé et ils disposent du soutient de la Fédération Wallonie-Bruxelles. 

Même après des heures et des heures de cours, les participes passés peuvent toujours poser des problèmes. Surtout avec l’auxiliaire « avoir ». On rappelle la règle qui en soi n’a aucune logique: quand le COD est placé avant le verbe, on accorde. Si pas, le participe passé reste invariable.

Alors, on pense tout doucement à abolir l’accord du participe passé avec l’auxiliaire « avoir ». C’est en tout cas la proposition de deux anciens profs de français belges, Arnaud Hoedt et Jérôme Piron. Dans une tribune dans le journal français Libération, ils expliquent leur point de vue: « Le temps moyen consacré aux règles actuelles est de 80 heures, pour atteindre un niveau dont tout le monde se plaint. Il serait tellement plus riche de le consacrer à développer du vocabulaire, apprendre la syntaxe, goûter la littérature, comprendre la morphologie ou explorer l’étymologie, bref, à apprendre à nos enfants tout ce qui permet de maîtriser la langue plutôt qu’à faire retenir les parties les plus arbitraires de son code graphique. »

Ils évoquent également une règle « obsolètes » et « compliquée jusqu’à l’absurde ».

Soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Les deux anciens profs ont soumis l’idée à la Fédération Wallonie-Bruxelles qui a décidé de leur accorder son soutien après la consultation du Conseil de la langue française et de la politique linguistique de la Fédération Wallonie-Bruxelles (CLFPL) et du Conseil international de la langue française (Cilf). En fait, les deux compères sont partis en croisade il y a quatre ans déjà pour essayer de changer cette règle, mais de manière un peu spéciale. Ils ont en effet monter une pièce de théâtre, enfin une « pièce-conférence » nommé La Convivialité pour faire partager leur idée de manière ludique.

Vu le succès du spectacle, ils ont ensuite décidé d’en parler aux autorités belges à savoir le Conseil de la langue française. « Les membres avaient décidé de s’attaquer à l’auxiliaire avoir, nous avons décidé ensemble d’utiliser l’écho de notre pièce pour en faire la promotion, explique Arnaud Hoedt. En réalité, aucune instance n’a le pouvoir d’imposer une règle d’orthographe, c’est l’usage qui fixe les règles. Donc il suffit de changer l’usage. » Plus facile à dire qu’à faire cela dit…

Académie française

Si les autorités belges sont plutôt favorables, ça risque d’être un peu plus compliqué pour convaincre les grandes pontes de la langue française: l’Académie Française. En effet, les linguistes sont bien souvent favorables aux changement d’orthographe mais à chaque fois, l’Académie les calme aussi sec. On pense notamment au « i » enlevé du mot « oignon » ou au « ph » transformé en « f » dans « nénuphar ». Cela avait été proposé en 1990 et ça avait créé un bordel pas possible. Finalement, les éditeurs de livres scolaires avaient décidé d’intégrer ces modifications dans les manuels en suscitant toujours autant de débats et discussions.

Du coup, les linguistes sont plutôt content de cette initiative lancée par les deux profs belges. Philippe Blanchet, linguiste à l’université de Rennes-2 s’exprime, lui aussi pour Libération: « Avec leur pièce, ils ont réussi à faire entendre au grand public ce que nous, les linguistes ne parvenons pas à faire! » Il rappelle également qu’il existe une « tolérance orthographique » est prévue dans la loi française depuis 1975 mais c’est comme si elle n’existait pas. En tout cas, on connait des millions d’élèves qui n’attendent que ça…

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