La ministre en charge de la Petite Enfance, Alda Greoli (cdH), dévoile enfin son projet de réforme des milieux d’accueil. Au programme : une refonte complète de l’organisation actuelle des crèches et autres structures d’accueil. Accessibilité, nouvelles places, simplification, voici les grandes lignes.
Le paysage de l’enseignement francophone belge se prépare à subir un gros lifiting. En plus du Pacte d’Excellence, qui réorganise l’école maternelle, primaire et secondaire, et de la réforme de la formation des enseignants, qui imposera notamment, dès 2020, aux futurs profs de passer par l’université et la haute école, un projet de réforme des crèches est dans les cartons du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Car pour la ministre en charge de la Petite Enfance, Alda Greoli (cdH), ce secteur a lui aussi besoin de son Pacte d’Excellence, « ses enjeux n’étant pas moindres que ceux de l’enseignement obligatoire ». Tous les jeunes parents peuvent d’ailleurs le confirmer : inscrire son enfant à la crèche est un vrai parcours du combattant. Il faut beaucoup de temps, d’énergie et un brin de chance pour obtenir une place dans un établissement proche de la maison.
La future réforme « Milac », abréviation pour « milieu d’accueil », négociée entre la ministre, le secteur et l’Office de la Naissance et de l’Enfance (ONE), entend donc pallier ces problèmes. Il reste à la ministre à présenter son projet au gouvernement cette semaine, mais les grandes lignes ont déjà été dévoilées dans la presse, ce lundi dans les colonnes du Soir.
Plus de places en Wallonie
Qu’est-ce qui changera concrètement ? Le premier point, et le plus important, concerne l’accessibilité des crèches, particulièrement dans les villes où il y a peu d’établissements. « À Louvain-la-Neuve, nous avons un taux de couverture de 85 %, alors qu’à Antoing, on est à 6,5 %, et à Seraing, 17 %, par exemple. C’est donc dans des zones où le risque d’inégalités sociales est plus grand qu’il y a un manque important. Ces zones seront dès lors prioritaires », explique au quotidien Alda Greoli.
En Wallonie, 2.000 nouvelles places devraient être créées avant la fin de la législature, dont 963 dans le Hainaut et en province de Liège, où le taux de couverture est le plus faible. Le tout pour un budget de 48 millions d’euros. Et en tout, un peu plus de 5.000 nouvelles places sont en cours de création.
À Bruxelles, la ministre souligne que c’est au gouvernement bruxellois à « investir dans les infrastructures, comme en Wallonie ». Car dans la capitale, « la difficulté, ce n’est pas un problème de places, de taux de couverture, mais d’accessibilité », pointe-t-elle.
Les places en crèches : 5000 en cours et plus de 2000 dans les prochains appels, avec une attention particulière pour le Hainaut et Liège où le taux de couverture est plus faible @BelRTL @Le_Bux
— Alda Greoli (@AldaGreoli) 22 octobre 2018
La crèche plus chère pour les parents plus aisés
Le deuxième point important de son projet est une réforme de la partie financière des parents, laquelle dépendra davantage des revenus des parents. Autrement dit, les crèches seront plus accessibles aux bas revenus, tandis que les parents qui gagnent bien leur vie devront payer plus cher pour mettre leurs enfants dans la même crèche.
Les parents devront-ils alors fournir leurs fiches de paye au moment d’inscrire leur enfant ? Comment cette différence de tarif sera appliquée et sur quel pourcentage de parents ? Pour l’heure, la ministre ne peut en dire plus, mais elle assure que le secteur bénéficiera d’un refinancement, ce qui devrait donc alléger la facture pour tout le monde.
Parmi les enjeux de cette réforme : que les milieux d'accueil actuels ne soient pas mis en danger, d'augmenter leur subsidiation, que les parents les plus fragilisés paient moins et que les tarifs soient plus lisibles pour tous @BelRTL @Le_Bux
— Alda Greoli (@AldaGreoli) 22 octobre 2018
Réorganisation en 3 types d’établissements et refinancement du secteur
Ce refinancement servira d’un côté à « pérenniser » les places existantes dans les crèches en même temps que créer des nouvelles places, et de l’autre côté à réduire les inégalités de financement des différentes structures d’accueil. Particulièrement les haltes-accueil (accueil occasionnel, de courte durée, pour des parents en réinsertion ou en formation, par exemple), qui manquent cruellement de subsides. La ministre entend également offrir plus de soutiens financiers aux structures qui accueillent des enfants handicapés, qui autorisent une certaine mixité sociale, ou qui offrent une flexibilité plus importante.
Pour cela, un budget de 11 millions d’euros est nécessaire. Greoli a déjà débloqué 6,5 millions d’euros pour résorber le retard de financement d’une première moitié des haltes-accueil et des « maisons communales de l’enfance ». À terme, les milieux d’accueil seront subventionnés à 100 % de leurs besoins de fonctionnement, mais la ministre n’est pas encore capable d’avancer un calendrier sur ce point.
Un autre point essentiel concerne la réorganisation de l’ensemble du secteur. Tu l’as sans doute expérimenté si tu es jeune parent : il existe des tonnes de structures, aux appellations très différentes et qui fournissent pourtant plus ou moins les mêmes services. La réforme Milac entend donc organiser le secteur en trois types de milieux d’accueil : 1. les crèches (dont la capacité minimale serait fixée à 14 places), 2. les services d’accueil d’enfants, et 3. l’accueillant indépendant ou le co-accueil d’enfants.
Un baccalauréat en éducation de l’enfance
En ce qui concerne les professionnels du secteur, le projet de réforme veut harmoniser les formations existantes et revoir les socles de compétences. La ministre expose sa vision des choses : « La formation initiale doit passer d’un accent mis sur le care à un angle plus educare. Au-delà des soins à l’enfant, la notion d’éducation doit prendre de l’importance. Il faut créer un baccalauréat en éducation de l’enfance, comme c’est d’ailleurs envisagé dans la déclaration de politique communautaire. Elle ne serait pas obligatoire, mais s’ajouterait aux formations déjà reconnues. À terme, il faudra aussi prévoir un certificat complémentaire pour les postes de direction, qu’il faudra envisager de financer partiellement. »
En plus de ce futur baccalauréat en éducation de l’enfance, Greoli souligne avoir débloqué 20 millions d’euros pour donner un statut aux accueillantes d’enfants conventionnées. 600 des 2.500 accueillantes sont déjà passées sous statut salarié, et d’ici 2025, elles devraient toutes obtenir ce statut plus stable. L’objectif étant de permettre des plans de carrière dans cette fonction.
Enfin, pour faciliter un peu l’inscription, les parents seront mieux informés. Dès le mois de janvier 2019, un site dépendant de l’ONE sera mis en place pour fournir en temps réel toutes les informations utiles, notamment en termes de places disponibles dans les crèches. Mais cela nécessitera bien sûr une collaboration active des milieux d’accueil.
La réforme des milieux d'accueil c'est aussi le statut d'accueillante conventionnée avec désormais un vrai statut de salariée. Bientôt 600 accueillantes sous statut ! @BelRTL @Le_Bux
— Alda Greoli (@AldaGreoli) 22 octobre 2018