« Je demande pardon »: des excuses du président chilien jugées insuffisantes face aux manifestations

Hier soir, Pinera a présenté ses excuses face à ses « compatriotes » chiliens, tout en annonçant de nouvelles mesures visant à améliorer le niveau de vie de la population. Un discours estimé loin du compte pour atténuer la situation.

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Le Chili était présenté il y a encore une semaine comme un pays à la croissance économique forte, exemple pour l’Amérique du Sud de croissance. En six jours d’émeutes, de manifestations, de déploiement de 10.000 militaires dans les rues, l’image du pays de Pinochet a changé radicalement.

Ce ne sont plus les chiffres qu’on regarde, mais les images de tanks dans les rues, de tirs de l’armée sur les manifestants et de couvre-feu imposé à la population (mais rarement respecté). Des « scènes de guerre » pour Quentin*, belge installé au Chili, et pour cause: Pinera, président actuel et cousin du ministre de l’intérieur a déclaré la guerre contre contre les manifestants.

Un pardon insuffisant

Ce mardi soir, Pinera a demandé pardon au peuple chilien en annonçant une série de mesures destinées à contenter la population. Parmi elles, une augmentation de 20% des pensions subventionnées par le gouvernement, de nouvelles assurances pour les maladies graves et les médicaments, un revenu mensuel minimum de 483$, une annulation de la hausse du prix de l’électricité de 9,2% prévue pour 2019, une nouvelle tranche de 40% des impôts des personnes gagnant plus de 11.000 $ par mois et des réductions salariales pour les membres du Congrès et les fonctionnaires les mieux payés.

Comme le pointe le New York Times, « ces mesures semblent peu susceptibles de satisfaire les manifestants. » Pour cause: dans les rues, on ne réclame pas seulement un changement de mesures, mais bel et bien une démission du gouvernement actuel.

Le rejet de ces excuses est loin d’être une surprise quand on s’en tient au fait. La hausse de 30 pesos du prix du ticket de métro aux heures de pointe qui a provoqué l’embrasement du pays n’était que la partie visible de l’iceberg. Au Chili, les aides et institutions qu’ont connait publiques et accessibles en Belgique sont privatisées: éducation, soins de santé, retraites, etc. Des scandales de corruption agitent également ce pays où les inégalités salariales deviennent insoutenables pour la population.

La réaction démesurée du gouvernement et de l’armée

Si on rajoute le nombre de décès de 15 personnes déclaré par l’Institut National des Droits de l’Homme (nombre remis en question et revu à la hausse par de nombreux militants), qui compte également « 226 personnes blessées, dont 123 par armes à feu » et « 1 692 personnes détenues », le discours et les mesures annoncées par Pinera est rejeté pour motif « insuffisant ».

https://twitter.com/CHVNoticias/status/1186837549525929984?s=20

Au-delà des chiffres, ce sont face aux images que la situation se concrétise. La riposte violente des militaires face aux manifestations pacifistes est la même que face aux saccages et aux émeutes: tirs dans la foule, tanks dans les rues, kidnappings soupçonnés….

Des images d’arrestations de dirigeants étudiants à leur domicile, reprises par CNN Chile et Telesur TV, circulent également.

L’INDH annonce aussi que des « déshabillements forcés » ont eu lieu. L’association a lancé plusieurs poursuites pénales vis-à-vis des crimes reportés.

Une vidéo témoigne de l’émotion qui s’empare actuellement du pays: à sa fenêtre, une femme chante Victor Jara, artiste assassiné par la junte chilienne sous Pinochet. Auteur du titre El Derecho de Vivir en Paz, il est un symbole de résistance, qui a résonné alors que le couvre feu était de mise. Suivi d’applaudissements de tout le bloc d’immeubles.

*Prénom modifié par souci d’anonymat.

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