Un tribunal de première instance aux Pays-Bas décidera mercredi si la compagnie pétrolière Royal Dutch Shell peut être considérée comme responsable pénalement du changement climatique. Une première dans le monde qui pourrait faire jurisprudence dans d’autres pays pour les entreprises pétrolières et gazières.
Shell est poursuivie par Milieudefensie, la branche néerlandaise des Amis de la Terre et 17.000 co-plaignants issus de la société civile. Selon l’association, l’extraction du pétrole entrave directement l’objectif des accords de Paris, c’est-à-dire la limitation du réchauffement climatique à 1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle. L’argumentation se base sur ‘la longue connaissance de Shell du changement climatique, les déclarations trompeuses sur ce sujet et les mesures inadéquates pour le réduire’, comme l’explique climatecasechart.com, qui recense toutes les actions en justice pour le climat. Les plaignants demandent à Shell de diminuer ses émissions de dioxyde de carbone de 45% d’ici 2030.
Shell se défend en expliquant qu’il n’existe aucune règle juridique qui les obligeait à éviter le réchauffement climatique et à faire baisser les émissions de CO2. L’entreprise n’est en outre pas liée aux Accords de Paris, seuls les pays signataires le sont. Ce sont donc aux gouvernements de prendre des mesures pour faire baisser le CO2 et non les entreprises. Enfin, selon Shell, ‘la lutte contre le changement climatique est un défi énorme et nécessite une approche collaborative et globale’. Un litige pénal n’avancerait donc à rien.
Créer un précédent
Toutefois, le monde entier aura les yeux braqués sur les Pays-Bas ce mercredi. Car si l’argumentation de Milieudefensie réussit et que les 20 jurés décident de juger Shell coupable, cela créera un précédent pour tous les jugements similaires dans le monde. Les grandes entreprises pétrolières pourraient être plus facilement poursuivies et condamnées pour leur impact dans le changement climatique. En France, l’entreprise Total est déjà attaquée en justice par les Amis de la Terre pour les mêmes accusations.
‘Les juges du monde entier sont confrontés à des affaires de changement climatique et se tournent vers d’autres juges pour obtenir des références’, explique Michael Burger, directeur exécutif du Sabin Center for Climate Change Law de la Columbia Law School à Bloomberg. L’affaire néerlandaise, quelle que soit la décision, deviendra une référence.
Actuellement, il existe 1.700 affaires pour le climat qui sont en cours dans le monde. La Belgique en compte 2 :
- ClienEarth attaque la Banque nationale belge pour avoir investi dans des entreprises à combustibles fossiles et avec de fortes émissions de CO2.
- L’Affaire Climat mène les gouvernements belges face aux tribunaux pour l’absence d’une véritable politique climatique, tout comme l’Affaire du Siècle l’avait fait en France. Le verdict devrait tomber en juillet.
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