Et si certains gènes prédisposaient à la criminalité? Des scientifiques ont établi un lien pour la première fois

Pourquoi certaines personnes finissent leur vie dans une prison et d’autres pas? Qu’est-ce qui fait qu’un homme ou une femme commet un crime et d’autres pas? Il y a des raisons sociales et économiques bien sûr, mais pas seulement. Certaines personnes qui croupissent en cellule partagent les mêmes traits de personnalité. Une partie importante de la population carcérale est en effet victime de trouble de la personnalité antisocial. Et ce trouble peut être lié à des gènes particuliers. Explications.

Le trouble de la personnalité antisocial (ASPD, Antisocial Personality Disorder) est un symptôme largement répandu dans les prisons. Si vous prenez dans la rue un échantillon de cent personnes, vos chances de croiser une personne victime d’ASPD est de 1 à 3%. Faites la même démarche dans une prison, et ce chiffre peut atteindre 40 à 70%.

C’est assez révélateur car les symptômes liés à l’ASPD sont l’agressivité, irritabilité, le mépris pour les règles, le mépris pour les autres et la malhonnêteté.

Mais bien sûr un tel diagnostic est assez controversé car il peut cacher toutes les autres raisons qui expliquent la criminalité. Sans compter que se trouble de la personnalité peut aussi se combiner avec d’autres maladies comme la psychopathie.

Mais il y a des raisons aussi de prendre ce problème au sérieux. Deux études menées séparément suggèrent que la génétique peut expliquer environ la moitié des cas d’ASPD, les facteurs environnementaux expliquant l’autre moitié. Et une nouvelle étude a démarré récemment pour essayer d’identifier quels gènes sont les plus impliqués dans le trouble de la personnalité antisocial, avec un certain succès.

Une première mondiale

C’est une équipe de chercheurs finlandais, américains et suédois qui est à la base de cette étude. Ils ont examiné ensemble les données sur un échantillon de criminels finlandais. Des données qui regroupent des tests psychologiques et le matériel génétique de 749 prisonniers précisément.

De ces 794 personnes, 568 ont été considérées comme souffrant effectivement d’ASPD. En comparant le matériel génétique de ce groupe à un échantillon de la population, bingo, les scientifiques ont pu identifier un certain nombre de gènes qui peuvent jouer un rôle dans l’apparition d’un trouble de la personnalité. Et si ces résultats sont vérifiés, il pourrait s’agir d’une première mondiale.

Des applications dangereuses

Après leurs explications, les chercheurs mettent immédiatement en garde sur les mauvaises applications d’une telle théorie. « Les conclusions de cette étude ne peuvent être transposées à des fins de prédictions ou être emmenées dans une cour de justice pour justifier un comportement », écrivent-ils dans leur rapport.

Par le passé, mélanger les gènes et la violence a souvent prêté à confusion. Certains procureurs ont mal interprété les conclusions des chercheurs en les utilisant comme preuves de la violence d’un accusé. Et d’autres études sur le sujet sont en cours, il s’agit donc de se montrer prudent.

Les raisons qui poussent les scientifiques à trouver un lien entre les gènes et la violence ne doit pas les empêcher d’avoir une certaine retenue dans leurs conclusions. Isoler un gène comme preuve qu’un individu est coupable ou non est le plus gros danger qui soit.

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