Banksy a encore frappé ! Un nouveau graffiti est apparu dans la nuit du 22 au 23 janvier. Il dépeint Cosette en pleurs, la petite fille maltraitée du roman « Les Misérables » de Victor Hugo. Dans une oeuvre efficace, il dénonce une fois de plus la façon dont l’Europe gère la crise migratoire. Entouré de mystère, le street-artiste utilise avec brio son art comme arme politique.
Samedi 23 janvier au petit matin, est apparu un nouveau graffiti de Banksy. L’endroit était bien choisi : juste en face de l’ambassade française à Londres, sur un panneau de bois recouvrant la vitrine d’un magasin en travaux. Trop dérangeant ou trop tentant pour les voleurs – deux hommes ont tenté de s’en emparer peu après son apparition -, le graffiti a aussitôt été recouvert de panneaux contreplaqués.
L’oeuvre représente Cosette, l’un des personnages du roman Les Misérables de Victor Hugo. L’enfant pleure, entouré d’un nuage de gaz lacrymogène et tournant le dos à un drapeau français en lambeaux.
À ses pieds, se trouve un code QR qui peut être scanné avec un smartphone et renvoie à une vidéo dénonçant l’usage de gaz lacrymogène par la police française début janvier pour déplacer 1.500 réfugiés de la « Jungle » de Calais. La vidéo a été postée sur le compte YouTube de « Calais Migrant Solidarity », un groupe de soutien aux migrants créé en 2009.
Elle contredit la déclaration au Guardian de Steve Brabet, le porte-parole de la préfecture du Pas-de-Calais. Celui-ci avait démenti l’usage de gaz lacrymogène par les policiers calaisiens : « Ce n’est pas dans notre intérêt […], à moins d’une nécessité absolue pour restaurer l’ordre, et on n’en utilise jamais à l’intérieur du camp. »
Steve Jobs et la défense des migrants
Banksy semble mener sa propre révolution contre les autorités européennes qui ne sont pas capables d’offrir des conditions de vie dignes aux milliers de migrants qui traversent les frontières de l’Europe. Son message est fort et efficace, ses oeuvres ancrées dans l’actualité. La fresque de Cosette est sa première oeuvre interactive.
C’est aussi la dernière en date d’une série d’oeuvres sur la crise migratoire. En décembre, l’artiste britannique avait réalisé trois graffitis à Calais pour dénoncer le sort des migrants. L’une d’entre elles mettait en scène Steve Jobs, un baluchon sur l’épaule et un ordinateur à la main. Elle rappelait que le créateur d’Apple était le fils d’un immigré syrien. Un de ses porte-parole avait ensuite déclaré au New York Times qu’Apple « est la société qui dégage le plus de bénéfices et qui paye plus de sept milliards de dollars d’impôts, mais c’est le cas seulement parce qu’un homme venu de Homs a pu venir ici ».
L’art comme arme politique
Ce n’est pas la première fois que l’art de Banksy, qui mêle poésie et humour, fait des remous politiques. L’été passé, l’activiste s’est fait remarqué par la création dans une station balnéaire anglaise du parc d’attractions Dismaland, une version glauque de Disneyland. Fin septembre 2015, la structure a été transposée à Calais pour être utilisée pour construire des abris pour les réfugiés.
À l’auteur Tristan Manco, Banksy a un jour déclaré qu’il aime le « côté politique » de son travail. « Tout graffiti fait un peu dissidence, mais les pochoirs ont une histoire de plus », a-t-il dit. « Ils ont été utilisés pour lancer des révolutions et arrêter des guerres. »
Les oeuvres de Banksy se démarquent par leur accessibilité et leur immédiateté. C’est sa capacité à réagir rapidement qui fait toute sa force. « C’est connu car c’est dans l’immédiat et visible au public. Il utilise l’art comme une arme. Je pense que de nombreux artistes utilisent la politique pour avoir accès aux galleries, tandis que Banksy fait le contraire », a déclaré Rachel Campbell Johnston, du London Times, au Daily Beast.
Sources : The Daily Beast, The New Yorker, Le Soir