La Pologne est sur le point d’adopter une nouvelle loi pour interdire l’emploi de l’expression “camp de la mort polonais”, ou de toute autre expression insinuant que les Polonais ont participé à l’Holocauste. Mais ce texte a suscité l’indignation dans le monde, surtout aux États-Unis et en Israël. Le gouvernement polonais a donc pris des mesures pour calmer le jeu… mais c’est un fiasco total.
Être ou ne pas être, telle est la question
En effet, le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a donné un discours la semaine dernière pour justifier l’adoption de cette loi. Dans son allocution, il a souligné que la Pologne respectait la mémoire des personnes assassinées au cours de l’Holocauste, mais que les camps où des millions de juifs ont été exterminés n’étaient pas polonais, mais allemands. Malheureusement, le traducteur a omis cette négation cruciale dans la traduction de ce discours figurant sur la vidéo officielle postée sur YouTube. Le gouvernement polonais a dû publier un correctif.
L’histoire à la sauce soviétique
Après cette maladresse, Morawiecki a également prononcé une version anglaise de son discours, dans laquelle il a déclaré que les Allemands étaient responsables de tous les crimes commis pendant la Seconde guerre mondiale, y compris les meurtres de milliers d’officiers polonais du massacre de Katyń. Or, c’est tout à fait inexact : ces exécutions ont en fait été commises par le NKVD, la police de l’Union soviétique. Cependant, il était d’usage d’accuser les Allemands de ces crimes lorsque la Pologne était encore un pays satellite du bloc soviétique.
Des Polonais exemplaires… et des collabos
A la fin de la semaine, le cabinet du Premier ministre polonais a organisé la visite d’un musée du village de Markowa (notre photo), pour que les journalistes conviés puissent se rendre compte à quel point il était difficile pour les citoyens polonais de porter secours aux juifs pendant la guerre. Le musée retrace l’expérience d’une famille polonaise exécutée par les nazis pour avoir caché des juifs.
Mais était-ce le meilleur exemple ? Certains des participants ont découvert que cette famille héroïque avait été dénoncée par ses voisins polonais. En outre, le peloton d’exécution qui a procédé à sa liquidation comprenait des officiers polonais… “Exactement le genre d’événements dont la nouvelle loi polonaise voudrait proscrire l’évocation”, résume Politico.
Un repas adapté
Les reporters ont ensuite été invités à se restaurer d’un plat typique. Sauf qu’il se composait d’une omelette garnie d’une Kiełbasa, une saucisse de porc… Un choix discutable, compte tenu qu’un certain nombre de journalistes étaient eux-mêmes juifs.
Des boulettes politiques
Certains politiciens ou médias proches du gouvernement n’ont pas manqué de réagir aux critiques qui ont été formulées à l’annonce de cette proposition de loi. “Ce que l’ambassadeur d’Israël a déclaré fait qu’il est difficile pour moi d’éprouver de la sympathie et de la gentillesse à l’égard des juifs”, a déclaré Beata Mazurek, la porte-parole du parti Droit et Justice au pouvoir dans un tweet (ci-dessus).
„To co zrobiła ambasador Izraela powoduje,że trudno mi będzie patrzeć z życzliwością i sympatią na Żydów”-ks.Zielński w #SalonDziennikarski
— Beata Mazurek (@beatamk) 3 février 2018
Un journaliste proche du gouvernement a qualifié les députés israéliens de “crapules cupides” ; un autre a invité les juifs polonais mécontents à déménager en Israël.
Quant à Morawiecki, il aurait lui-même déclaré que son gouvernement “avait fait plus d’efforts que les gouvernements polonais précédents pour améliorer les relations polono-israéliennes”. Le monde appréciera…