« On nous prend pour des cons »: face à la souffrance des athlètes, le monde sportif s’indigne au Qatar

Des scènes surréalistes se déroulent au Qatar où la chaleur met en danger les sportifs du mondial d’athlétisme. « Dystopie », souffrance et stades vides sont maîtres mots pour décrire l’événement. Les réactions virulentes vis à vis de l’organisation s’enchaînent, en accusant le Qatar et l’IAAF d’avoir oublié l’intérêt des athlètes dans l’organisation.

Pistes quittées en chaises roulantes, bouteilles d’eau pour tenter de se refroidir, jets de clim violents et athlètes qui jettent l’éponge: ces mondiaux d’athlétisme ne prédisent rien de bon pour les sportifs qui s’aventurent au Qatar. Au matin du quatrième jour d’épreuves, l’indignation gronde auprès des sportifs et fans d’athlétisme.

28 femmes sur 68 ont laissé tomber le marathon en cours de route. Un record d’abandons jamais vu auparavant, dû à la chaleur insoutenable: « La transpiration ne s’évapore pas. Du coup, le corps ne parvient pas à se refroidir. », a expliqué le Roel Parys, médecin de l’équipe belge composée de Soccol et Hanna Vandenbussche. l »Quand la température corporelle monte au-dessus de 40°, le rythme cardiaque diminue et les organes arrêtent de fonctionner comme d’habitude. »

Des conditions très dangereuses pour les sportifs et sportives. Certains ont appris à peine deux semaines en amont qu’ils allaient partir pour Doha au Qatar, sans délai pour tenter un tant soit peu de s’entraîner pour résister à la chaleur humide. Même là-bas, on renifle un soupçon de manque de préparation.

Tu vois quelqu’un tombée sur la course et c’est extrêmement terrifiant. Tu pourrais être cette personne au prochain kilomètre, aux prochains 500 mètres.

Lyndsay Tessier, marathonienne canadienne

Les stades sont vides, les courses se déroulent la nuit par 32 voire 40° avec près de 80% d’humidité… La souffrance est de mise pour les athlètes, qui sont soit contraints à la clim, soit soumis à la moiteur. Yohann Diniz, marathonien français à présent ex-tenancier du titre de médaillé d’or au 50 kilomètres marche, a été l’un des plus virulents vis à vis de la compétition. Durant l’épreuve, il a jeté l’éponge au dix-septième kilomètre.

Je suis un peu dépité. Je suis arrivé ici en très grande forme mais il y a plein de choses qui m’interpellent. Tous les athlètes vont prendre le départ mais en ce qui concerne le hors-stade, on nous prend pour des cons. Je suis énervé. 

Yohann Diniz, ex-tenant du titre 50 km marche
EPA/Kevin Mayer

Les réactions fusent, venant d’athlètes comme de commentateurs. S’il y avait un terme pour décrire ces mondiaux d’athlétisme, ce serait: du jamais-vu.

On voit tous que c’est une catastrophe, qu’il n’y a personne dans les tribunes, la chaleur n’est pas du tout adaptée. C’est triste.

Kevin Mayer, décathlonien français recordman du monde

L’esprit sportif oublié dans l’organisation

Ces mondiaux d’athlétisme sont considérés comme un risque insensé au nom d’une vitrine publicitaire pour le Qatar. L’événement sportif n’est en rien dans l’intérêt de ceux qui y participent, mais bien de ceux qui l’organisent. Pour la chroniqueuse sport Virginie Phulpin, « ce qu’on a vu sur les épreuves de fond sur route, c’est de la souffrance. Pas une souffrance liée à l’effort du marathon, non. La souffrance de courir dans des conditions inhumaines. »

Au-delà des athlètes, c’est toute la communauté passionnée qui gravite autour du monde sportif qui s’indigne et se soucie de la sécurité des athlètes sur les réseaux sociaux.

https://twitter.com/Yannick_Kmbl/status/1178216977132900352?s=20

La compétition va se poursuivre jusqu’au 6 octobre. Certains pourraient bien mettre plusieurs mois pour se remettre d’épreuves où la principale réussite est d’y survivre plus que de gagner.

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