Anne Gruwez interdite de parler de « Ni juge, ni soumise », l’attitude de Hennart très critiquée

« Ni juge ni soumise » fait partie des nominés pour les Magritte du Cinéma 2019. Le documentaire de Libon et Hinant se penche sur le caractère exceptionnel de la juge Anne Gruwez. Mais à 10 jours de la cérémonie, on apprend que le juge Luc Hennart a interdit au personnage central de s’exprimer publiquement sur le film. Et ce, depuis avril 2018.

« Ni juge, ni soumise », un film qui dérange? C’est en tout cas une production qui a fait un carton dans les salles belges (plus de 75.000 entrées) et à l’international. Ce documentaire de Jean Libon et Yves Hinant – les deux compères derrière la cultissime émission Strip-Tease – suit le quotidien d’Anne Gruwez, juge au caractère hors du commun et aux méthodes plutôt surprenantes.

Ce long-métrage documentaire, que certains critiques ont parfois rapproché de la fiction tant il sort de l’ordinaire, pointe également les rouages souvent foutraques du système judiciaire belge. Et c’est ce qui semble hérisser les poils à certains membres de ce système. En tête de liste, il y a Luc Hennart. Le président du tribunal de première instance de Bruxelles a avoué à la DH qu’il avait interdit à Anne Gruwez de s’exprimer publiquement sur « Ni juge, ni soumise ».

Dès le mois d’avril

L’interdiction imposée par Hennart remonte en fait au mois d’avril 2018. Depuis, Gruwez ne peut plus assister aux différentes projections du film et répondre aux questions de l’assistance. Vendredi passé, le barreau de Bruxelles a organisé une projection de « Ni juge, ni soumise ». À cette occasion, le bâtonnier Michel Forges avait invité Anne Gruwez à participer au débat qui devait suivre cette projection, raconte la DH. Luc Hennart a interdit la juge de s’y rendre, mais il y a été lui. Et il a pu voir le film pour la première fois.

« Cette chose n’a rien à voir avec le quotidien d’un juge d’instruction. (…) Anne Gruwez me fait penser à un singe assis sur un orgue de barbarie », a-t-il indiqué à La Libre. Un constat qui rappelle d’autres critiques qui avaient été adressées au film en 2018. Manuela Cadelli, présidente de l’Association syndicale des magistrats (ASM), indiquait en mars 2018 dans une carte blanche que ce film dégageait « une forme de subversion pathétique », estimant que « le rire qu’elle suscite est un rire mauvais, cruel et inconscient ».

Trop proche du Parti socialiste?

Tout autant critique qu’elle ait pu être à l’égard du docu, Cadelli reste néanmoins convaincue que le comportement de Luc Hennard est « abusif, absurde et dangereux car il met en cause la liberté d’expression ». Elle confie à La Libre avoir trouvé le film parfois racoleur mais ajoute avoir été ébranlée par les témoignages qu’il présente. Ce qui l’amène, elle et l’ASM, à soutenir « à 100% » Anne Gruwez.

Et elle ajoute: « Je ne comprends pas l’attitude d’un chef de corps qui n’hésite pas à se répandre à la télévision et à faire connaître ses préférences politiques, en l’occurrence sa proximité avec le Parti socialiste ». En effet, Hennart a régulièrement été critiqué pour être trop proche du PS. En 2017 déjà, Olivier Chastel remettait en cause son impartialité, se demandant si le président du tribunal de première instance ne devait pas « assumer jusqu’au bout son positionnement politique et s’engager officiellement aux côtés de la famille politique dont il se sent si proche ».

Et du côté de la réalisation, on en pense quoi? Jean Libon affirme ne pas comprendre l’attitude du juge. « Il fait partie des personnes qui ont donné leur autorisation au tournage », déclare-t-il à La Libre. « C’est très étrange, en fait c’est très belge… »

La question qui se pose maintenant est: Anne Gruwez pourra-t-elle s’exprimer aux Magritte du Cinéma si le documentaire est primé?

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